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Version officielle du rapport final de la commission spéciale d'enquête du Sénat sur la mort suspecte du juge Jean Serge Joseph

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Après avoir auditionné des témoins-clés et acteurs de ce dossier troublant qui n'en finit pas de faire des vagues, les investigateurs recommandent la mise en accusation du Président Michel Martelly, du Premier ministre Laurent Lamothe et du ministre de la justice, Jean Renel Sanon, qui seraient coupables de parjure, la mise à pied -suivie d'un éventuel procès- du doyen du tribunal civil de Port-au-Prince, Raymond Jean-Michel, qui aurait également menti et des poursuites judiciaires contre Me Gary Lissade, accusé de recel

Introduction et Mise en contexte

Les Faits : que s'est-il passé au juste ?

a) Qui a vu ? Qui a entendu ?

b) Qui a fait quoi ? Qui n'a pas fait quoi ?

Analyse des Données collectées à partir d'auditions de témoins et d'acteurs

Interprétation des faits

Conclusions

Recommandations a) D'ordre général b) D'ordre spécifique Introduction

Le samedi 13 Juillet 2013, vers les 20 heures, est survenu à l'hôpital Bernard Mevs dans la commune de Delmas, le décès du juge Jean Serge Joseph, magistrat en charge du dossier de l'enquête sur l'épouse et le fils du président de la République, tous deux accusés de corruption, de concussion, de détournement de biens publics et d'usurpation de fonction. En effet, le juge y a été transporté par les soins de sa famille vers les 3 heures le même jour dans un état jugé par les responsables du centre hospitalier de non coopérant, ce qui sous-entend dans le jargon médical un état comateux, un état d'inconscience. Passé la phase de triage, le patient a été admis par le docteur Linda Théodore, urgentiste en rotation ce soir-là, qui a immédiatement requis les services du docteur Barth Green, un professeur de l'Université de Miami qui, dans le cadre du partenariat existant entre le centre hospitalier Bernard Mevs et le centre universitaire floridien, assurait la rotation ce soir-là. Le malade a été pris en charge, examiné, et les soins que requérait son cas lui ont été prodigués, selon les indications du dossier médical du patient Jean Serge Joseph.

Le diagnostic auquel les médecins sont parvenus à la suite d'un test au scanner réalisé sur place mais interprété par un groupe de médecins travaillant en synergie, tant en Haiti qu'en Floride, a révélé une hémorragie massive au niveau de l'hémisphère droit du cerveau, ce qui a provoqué une hémiplégie gauche. L'imagerie produite par le test au scanner a été communiqué au docteur Ariel Henry, neurochirurgien affilié à l'hôpital Bernard Mevs. Le médecin a décidé d'opérer immédiatement sur la base de l'imagerie qui lui a été communiquée, mais quand il est arrivé à l'hôpital et a vu le patient face à face, et communiqué avec les médecins qui s'en étaient chargés avant lui, il a changé d'avis et préféré attendre que selon la pratique le sang coagule avant d'opérer, car la source du saignement n'avait pas pu être identifiée.

Le patient a été maintenu sous observation jusqu'à ce que le docteur Green ait annoncé a la famille que le cas du juge ne leur laissait que très peu d'espoir. L'événement le plus redoutable est arrivé, le soir du même jour, vers les 20 heures, le juge Jean Serge Joseph a succombé des complications de son accident vasculaire cérébral.

Ce décès pour le moins suspect a soulevé un véritable émoi au niveau de toute la nation, et certains secteurs ont immédiatement mis en cause la responsabilité de l'administration Martelly-Lamothe dans l'explication de ce décès. Les rumeurs de toutes sortes on laissé entendre qu'une certaine réunion à laquelle le juge aurait été convoqué et à laquelle auraient participé et le président de la République, et le Premier ministre, et le ministre de la justice ; et pendant laquelle des pressions indues auraient été exercées, et des menaces déplacées auraient été proférées seraient à la base des troubles qui auraient conduit chez le juge Joseph a un accident vasculaire cérébral. La nation a été bouleversée et l'est encore. Des explications sont exigées et des enquêtes réclamées tant par des citoyens s'exprimant en leur nom propre et au nom de leur attachement à la démocratie, que par des organisations de la société civile se positionnant au nom de leur mission de défense des droits et libertés de la personne, et aussi tant par les partis et organisations politiques s'insurgeant contre une possible menace à l'indépendance de la justice, a l'équilibre des pouvoirs publics, et aussi contre une possible atteinte aux acquis démocratiques, et enfin un possible péril de l'état de droit en Haïti.

Le Sénat de la République a attendu trois jours durant pour voir si la justice se serait saisie de l'affaire. Le constat ayant été négatif, au cours d'une conférence des présidents de commissions à l'extraordinaire, et sur la demande du président de la commission Justice et Sécurité publique et du président de la commission Droits Humains et Anti-Corruption du Senat, une résolution a été adoptée à la séance en assemblée plénière qui a suivi la conférence des présidents. Ainsi, en date du 17 Juillet 2013, une commission spéciale d'enquête a été formée des sénateurs :

- Pierre Francky EXIUS, président de la Commission Justice et Sécurité publique ;
- Westner POLYCARPE, président de la Commission Santé Publique et Population ;
- François Anick JOSEPH, président de la Commission Intérieur et Collectivités Territoriales ;
- Steven Irvenson BENOIT, premier secrétaire du Bureau ;
- et Joël Joseph JOHN, deuxième secrétaire du Bureau.

Cette commission spéciale d'enquête a pour mission de faire le jour sur les circonstances ayant entouré la mort du juge Jean Serge JOSEPH. Cette commission bénéficiait d'une période de huit (8) jours ouvrables pour enquêter et produire son rapport. Aussi, dès la fin de la séance, cette commission s'est-elle mise au travail, élisant en son sein un président (François Anick JOSEPH) et un rapporteur (Westner POLYCARPE). La méthode de travail a donc été immédiatement adoptée et un agenda bâti. Une correspondance a été adressée au président du sénat lui demandant d'adresser des correspondances à certains dignitaires de l'Etat afin qu'ils se rendent disponibles pour rencontrer les membres de la commission. Les travaux de la commission ont débuté dès le lendemain avec des séances d'audition de témoins et de collecte de données documentaires.

Les Faits

1.- Tout a commencé le jeudi 16 Aout 2012, quand Maitre Newton Louis Saint Juste a adressé une lettre au Parquet de Port-au-Prince pour dénoncer des actes que le dénonciateur qualifie de corruption. Le dénonciateur basait son accusation sur le fait que l'épouse du président (Madame Sophia Saint Remy Martelly) et son fils (Olivier Martelly) présidait chacun une commission présidentielle qui disposait de grands fonds issus des caisses du trésor public. Cela a causé un certain émoi dans les medias de la capitale car, c'était la première fois qu'un citoyen osait s'aventurer sur ces sentiers non encore explorés par les bâtisseurs vertueux de la démocratie.

2.- Cela ne devait pas s'arrêter là, car le commissaire du gouvernement près le Tribunal de Première instance de Port-au-Prince allait convoquer Maitre Saint Juste aux fins de fournir plus de détails sur sa dénonciation. Aussi Maitre Saint Juste a-t-il répondu a cette convocation du commissaire du gouvernement le vendredi 24 Aout 2012. Le dénonciateur ayant été entendu, le commissaire du gouvernement a décidé séance tenante de classer l'affaire sans suite.

3.- Quelques jours plus tard, soit le samedi 1er Septembre 2012, Monsieur Joseph Guyler C. Delva, secrétaire d'Etat à la communication a pu être entendu sur les ondes de Radio Quisqueya, précisant avec un brin de certitude, que l'argent que dépensaient l'épouse du président de la République Madame Sophia Saint Remy Martelly et son fils Olivier Martelly provenait de dons du secteur privé.

4.- La famille présidentielle allait contre-attaquer quand le lundi 3 Septembre 2012, par le biais de son avocat Maitre Reynold Georges, elle annonçait sa volonté d'intenter une action en diffamation contre Maitre Newton Saint Juste. L'avocat a précisé qu'aux termes de l'article 196 du Code civil haïtien, les époux se supportant mutuellement, le président avait le droit de passer des ressources a son épouse.

5.- Le lendemain, soit le mardi 4 Septembre 2012, Maitre Saint Juste revient à la charge en adressant une nouvelle correspondance au commissaire du gouvernement pour suggérer qu'il y avait lieu d'ouvrir une enquête judiciaire sur la base des déclarations de Maitre Georges, car de telles déclarations pouvaient être considérées comme preuve de la concussion dont il faisait état. Dans cette même lettre, Maitre Saint Juste fait une nouvelle dénonciation d'usurpation de fonction, infraction punissable par la loi haïtienne.

6.- L'affaire devait par la suite prendre corps au point d'avoir une existence propre a elle-même. La famille présidentielle, selon tous les indices disponibles et découverts, a mis en branle toutes les garnisons qu'elle avait a sa disposition pour essayer d'étouffer l'affaire ou même de la noyer. Aussi des pressions avaient-elles été exercées sur le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince Maitre Jean Renel Senatus pour qu'il procède a l'arrestation de Maitre Saint Juste, pour injures a la présidence et diffamation. Maitre Senatus n'a pas pu résister aux pressions qui selon ses propres termes ont été exercées sur lui par le ministre de la justice Maitre Jean Renel Sanon. Il a démissionné de son poste le 26 Septembre 2012.

7.- Le 11 Octobre 2012, le ministre de la justice a répondu à une invitation de la commission justice et sécurité publique du sénat. Il a, au cours de cette réunion, nié toutes les allégations du commissaire du gouvernement.

8.- L'affaire a connu entre temps une certaine accalmie jusque vers la troisième semaine de janvier, soit le 22 Janvier 2013 quand un citoyen répondant au nom de Enold Florestal fait une citation au correctionnel pour usurpation de fonction. Cette action vise l'épouse et le fils du président, respectivement Madame Sophia Saint Remy Martelly et Olivier Martelly. Monsieur Florestal constitue Maitres André Michel et Newton Louis Saint Juste comme avocats.

9.- Le 19 Mars 2013, l'affaire a effectivement démarré au palais de justice de Port-au-Prince quand le tribunal est officiellement lie. Le juge Jean Serge Joseph est en charge de l'affaire et a décidé de la reporter à la huitaine.

10.- A la huitaine, les avocats Michel et Saint Juste ne se présentent pas. Le juge fait une sommation d'audience au 14 Mai 2013. Les avocats ne se présentent toujours pas, l'affaire est reportée au 21 Mai 2013. A cette date, le juge Joseph a prononcé un jugement avant-dire droit reportant l'affaire au 11 Juin, suivi d'un autre report au 18 Juin 2013.

11.- Le mardi 18 Juin 2013, l'affaire est entendue, mais la plaidoirie se déroule autour des vices de forme contenus dans le jugement du juge Joseph. L'affaire est alors à nouveau reportée au mardi 02 Juillet 2013.

12.- Ce mardi-là, l'affaire est à nouveau entendue par devant le juge Jean Serge Joseph. A cette occasion, les avocats Newton Louis Saint Juste et André Michel plaident et demandent au tribunal de citer comme témoins à comparaitre des grands commis de l'Etat tels le premier ministre, le ministre des finances, etc. Le tribunal rend un jugement avant-dire droit dans lequel il sollicite le commissaire du gouvernement qu'il obtienne du président de la République l'autorisation pour ces grands commis de l'Etat de comparaitre par devant le tribunal correctionnel aux termes de l'article 400 du Code d'instruction criminelle.

13.- Mais l'avocat de la famille présidentielle n'encaissera pas le coup. Il interjette appel dès le 08 Juillet 2013. Le commissaire du gouvernement fait de même. Le texte de l'appel précise qu'ils ont demandé à la cour d'appel de Port-au-Prince de revenir sur ce jugement pour 'torts et griefs causes a la famille présidentielle par cette décision'.

14.- Le mardi 09 Juillet 2013, le doyen du tribunal de Première instance de Port-au-Prince Maitre Raymond Jean Michel prend le juge Jean Serge Joseph dans son véhicule de service et se rend avec son passager (selon le doyen lui-même) au restaurant Table de Cajus au Champ de Mars pour discuter quinze ou vingt minutes durant d'une question simple. Selon le doyen, le juge voulait seulement savoir si le pouvoir exécutif exerçait des pressions contre lui.

Mais selon les récits confiés par le juge à plusieurs de ses amis et connaissances, c'est plutôt le doyen qui l'a amené à rencontrer l'avocat de la famille présidentielle au cabinet de Maitre Gary Lissade.

15.- Rentré de Washington en toute urgence, rappelé selon ses dires par le gouvernement, Monsieur Léon Charles rencontre Monsieur Enold Florestal le mercredi 10 Juillet 2013, et lui propose d'abandonner la poursuite, de laisser tomber l'affaire, de retirer sa plainte contre la famille présidentielle. Monsieur Florestal refuse. Devant son refus, Monsieur Charles fait monter les enchères et appelle au téléphone le premier ministre Monsieur Laurent Lamothe. Celui-ci entretient Monsieur Florestal pendant quelques minutes. Il lui propose en outre un poste à l'extérieur du pays et de l'argent pour qu'il se décide à abandonner la poursuite initiée contre la famille du président.

16.- Le juge Jean Serge Joseph confie à son ami le juge Morin qu'il a été invité par le doyen à rencontrer de très hautes personnalités du gouvernement autour de l'affaire initiée contre la famille présidentielle et dont il avait la charge. Le juge Morin lui conseille de ne pas s'y rendre. Plus tard, il revient dire au juge Morin qu'il en a parlé à son ami et conseiller Maitre Samuel Madistin qui lui a dit qu'il pouvait s'y rendre mais qu'il n'avait aucune concession à faire. Le juge Morin hausse les épaules et ne dit plus rien.

17.- On est le jeudi 11 Juillet 2013, les services de météorologie avaient annoncé un cyclone et l'alerte rouge a été déclarée le jour précédent. Les travaux des cours d'assises dans la région métropolitaine avaient été momentanément suspendus. Ce jeudi, les locaux du palais de justice de Port-au-Prince avaient été pratiquement presque vides. Mais le juge Jean Serge Joseph qui, aux dires de ses pairs, ne rate presque jamais un jour de travail était venu sur les lieux. Comme il avait remarqué qu'il n'y avait presque pas d'activités, il est retourné chez lui à Cabaret. Vers 12h30, il est en conversation au téléphone avec son épouse quand le doyen qui n'arrêtait pas de l'appeler au téléphone appelle à nouveau. Il renvoie son épouse pour répondre au doyen qui lui dit (selon les témoignages concordants et de l'épouse du juge et du doyen) avoir besoin de lui. Le juge Joseph demande que le doyen lui accorde une heure pour qu'il le rejoigne. Arrivé au palais de justice, le juge Joseph gare son véhicule dans les parages du parquet et continue à longer à pied la cour du palais vers le sud pour rejoindre le doyen qui l'attend déjà dans son propre véhicule en marche. Le juge était accompagné de son agent de sécurité, l'officier de police Johnny Pierre et de son cousin et confident Berlens Joseph plus connu sous le sobriquet de Ti Sourit. Le doyen instruit le juge de laisser là ses accompagnateurs car lui n'avait personne avec lui. Au moment de démarrer, le juge plaisante à l'huissier Figaro : « Tu as vu avec qui je suis sorti. » Il était près de 15 heures et le véhicule du doyen file vers l'est de la capitale. Destination : selon le doyen, le même restaurant de mardi (Table de Cajus) ; selon les récits confiés par le juge à son épouse, ses amis et connaissances, le cabinet d'avocat de Maitre Gary Lissade.

18.- Vers 19h, le véhicule du doyen revient avec les mêmes occupants : le doyen Jean Michel et le juge Joseph. Le juge qui est déposé là ou son véhicule l'attendait (sur la cour du Parquet) ordonne à son cousin de transférer un sac de riz de son véhicule à celui du doyen. Ce qui est vite fait. Au moment de vider les lieux, le doyen s'enquiert : « Qui est en charge de la sécurité du juge ? » Et Johnny Pierre répond par l'affirmative. Alors le doyen lui confie : « Juj la nan men w. » Et le juge rentre chez lui, selon ses proches visiblement paniqué.

19.- Rentré chez lui, le juge appelle son épouse comme il le lui avait promis avant son départ pour la réunion. Le juge Joseph explique alors à son épouse qu'il ne peut lui faire un compte rendu de la réunion par téléphone car il a des suspicions que son téléphone est sous écoute. Il promet à son épouse d'aller emprunter un autre appareil de téléphone afin de lui raconter de fil en aiguille la rencontre.

20.- Le vendredi 12 Juillet 2013, le juge, comme à son habitude se rend au palais de justice. Il retient tous ceux qui passent devant son bureau pour leur expliquer sa mésaventure d'hier soir. Il pousse dans son bureau le juge Morin et lui raconte ce qui s'est passé, va au bureau du juge Saint Vil et lui raconte l'histoire, le juge Surpris pénètre dans les bureaux du juge Saint Vil, il lui raconte aussi la même histoire. Mais le juge Surpris le prend à partie pour s'être rendu à une réunion inopportune et pour ne pas avoir averti d'avance ses amis juges. Il prend dans son bureau Madame Ketly Julien de l'organisation IMED et lui raconte l'histoire, celle-ci lui propose de revenir pour enregistrer l'histoire le lendemain. L'avocat Samuel Madistin auquel il avait parlé plus tôt de la question revient à son bureau et juge Joseph lui explique comment la réunion s'était déroulée.

21.- Ce même vendredi 12 Juillet 2013, Madame Ketly Julien de l'IMED s'était rendue au bureau du doyen Jean Michel accompagnée de Madame Jacqueline Charles du Miami Herald. Cette visite devait permettre à Madame Charles d'avoir une entrevue avec le doyen afin de rendre compte des problèmes du Tribunal de Première Instance, des juges d'instruction, et de l'accompagnement de l'IMED au tribunal. Selon Madame Julien, cette entrevue n'a duré que vingt minutes. Selon le doyen, elle aura duré deux heures. L'important dans tout cela, c'est que le doyen a raconté à la commission sénatoriale d'enquête que pendant tout ce temps-là, le juge Joseph n'arrêtait pas de venir à son bureau. Chaque fois, il était occupé et ne pouvait recevoir le juge. Selon le doyen, le juge se serait présenté à son bureau sept ou huit fois de suite. Au bout du compte, le juge est parti en demandant au doyen de l'appeler et lui passant un numéro de téléphone, avec la précision qu'il s'agit d'un numéro de Natcom que tous n'avaient pas à leur disposition et que c'est le numéro qu'il utilisait pour appeler son épouse.

22.- Le doyen n'a pas appelé le juge ce soir-là. Le juge s'est rendu à l'Estère puisqu'il avait rendez-vous avec son épouse pour ramener celle-ci à Port-au-Prince le même soir. C'est l'épouse qui prend l'initiative et demande au juge son époux de lui raconter ce qui s'était passé à la réunion du jeudi. Il fait un récit exhaustif à son épouse de la teneur de la réunion, de l'identité des participants et de leur prise de position.

23.- Vendredi soir, le juge Joseph est rentré de l'Estère ramenant avec lui son épouse Rachel (qui devait répondre à un rendez-vous chez un dermatologue), sa fille de 11 ans Jessica, boss Fito (un plombier qui était parti avec lui à l'Estère aux fins d'évaluer les couts d'un travail à réaliser), et Berlens Joseph son ange gardien. Ce soir-là, tout semblait calme et rien ne prédisposait quiconque à appréhender l'événement fatal qui allait survenir quelques heures plus tard.

24.- Vers les deux heures le samedi 13 Juillet 2013, Rachel est tirée de son sommeil par le bruit de quelque chose qui tombe. Elle regarde dans la direction du bruit et voit son mari Jean Serge Joseph essayer de ramasser un récipient dans lequel il pissait. Le récipient tombe une seconde fois. Alors Rachel vole au secours de Jean Serge en prenant elle-même le récipient et le tenir pour qu'il pisse. A ce moment, Jean Serge trébuche et Rachel le retient de son bras droit. Elle lui pose une question à laquelle il ne pouvait répondre. Il n'avait plus l'usage de sa langue. Rachel appelle Berlens qui descend dans la chambre ou se trouvaient le couple et l'enfant. Berlens reçoit l'ordre d'aller chercher de l'aide auprès du propriétaire de la maison. Il revient avec une réponse négative. Rachel lui intime l'ordre de rester avec Jean Serge pendant qu'elle partait chercher le propriétaire. Elle le trouva aussitôt sortie dans la rue, et les deux sont allés chercher de l'aide auprès des policiers cantonnés au commissariat de Cabaret. Les policiers viennent avec Rachel et le propriétaire et aussitôt embarquent Jean Serge dans le véhicule de la police qui n'avait pas assez de carburant pour le trajet, et Jean Serge a été descendu du véhicule de la police pour être réembarqué dans son véhicule de service. Il est conduit à l'hôpital Bernard Mevs ou il a été pris en charge.

25.- Le fait le plus brut qui ressort de tous les récits et que tous les témoins ont rapporté, c'est que le juge Joseph avait été visiblement paniqué et qu'il était aux dires de certains au bord de sombrer dans une quelconque dépression. Il était agité et demandait conseil à tous. Mais il avait une décision arrêtée selon ce qu'il avait confié à certains : celle de siéger à nouveau le mardi 16 Juillet 2013 pour entendre l'affaire et se dessaisir comme dit-il on le lui avait demandé. Par la suite, il démissionnerait et quitterait le pays.

RESUME DES AUDITIONS

Berlens Joseph, homme de confiance du Juge Jean Serge Joseph, qui aurait aussi été entendu par le RNDDH, quatre juges de la CSPJ, et autres entités dans le cadre de l'enquête, est né le 19-10-1988. Il accompagne toujours le juge dans son véhicule, dans son appartement à cabaret et dans sa maison, à l'Estère. Berlens (alyas Ti Sourit) déclare :" se denpi nan lane 1999 mwen konnen jij la. Li voye m lekòl, mwen rann li sèvis, mwen t ap jere yon sibèkafe pou li, enpi li vin mande m pou m akonpanye l lè l ap monte potoprens... Abitid jij la, nan jou travay, se soti bò 6 zè nan maten li ale nan biwo, jis rive 4-5 kè apremidi. Li pa janm dòmi pòtoprens, se kabarè li dòmi. Se jij la ki toujou kondi machin li, li pa gen chofè.

Souvan se ak Mèt Madisten l ap pale sou konsèy kòman pou l abòde dosye ki konsènen madanm ak pitit Michèl Mateli, ansanm ak minis yo ki dwe parèt nan tribinal.

Nan jedi 11 jiyè 2013 nan maten, jij Sèj te nan tribinal la, li di fòk li ale kabarè, enpi li dwe mande madanm li otorizasyon pou l al rankontre ak minis jistis la menm jou apremidi a. Dwayen an rele jil Sèj bò 2 zè apremidi konsa pou yo pran randevou nan pakè a. Rive nan pakè a, machin dwayen an pa gen ni chofè, ni sekirite, li gen yon kòstim ble sou li, yon chemiz blan ak yon kòl wouj. Motè machin dwayen an te deja ap mache. Dwayen an, se yon moun ki pale sou pwent lang. Machin dwayen an, se yon Nisann patwòl blan ak vit tente. Dwayen an di Sèj, li pa bezwen ale ak sekirite, l ap monte nan machin dwayen an. Li te bò 3 zè, 3 zè edmi nan apremidi... Lè yo deplase, gen 2 lòt machin ki derape dèyè yo.

Lè yo retounen bò 6 zè apremidi konsa, jij Sèj mande m pou m pran diri a ki te nan machin li pou m mete l nan machin dwayen an. Diri a se 10 mamit nan yon sak angrè jo n, ki make agro-sèvis. Pandan nou sou wout pou ale kabarè, m tande jij Sèj pale ak mèt Madisten. M tande jij Sèj di l ap retounen kanada. Li di mèt Madisten se nan biwo mèt Gari Lisad li te rankontre ak otorite yo. M tande l site non minis jistis la Jan Renèl Sanon, prezidan Mateli, premye minis la Loran Lamòt ak yon lòt mesye ankò ki te nan rankont la. Lòt mesye a, se yon mèt, m pa sonje non l. Sou wout la, pandan plizyè fwa telefòn jij Sèj sonnen, m tande l di dwayen, kòmkwa se ak dwayen an l ap pale.

Lè l rive aswè menm jedi a, li di m al achte gatorèd pou li ak yon galon dlo. Pandan lannuit la, li pa janm ka dòmi, li gentan bwè tout galon dlo a, li di m li santi vant li cho.

Nan vandredi 12 jiyè 2013, nan maten, Jij Sèj di m dwayen an di l bezwen l ijan. Pat gen tribinal jou sa lakòz tanpèt Chantal. Lè jij Sèj rive nan tribinal la, li fin pale ak dwayen an, m wè jij Sèj rele plizyè lòt jij pou l pale ak yo, tankou : jij Lama Belizè, jij Wilnè Moren, jij Bèj O. Sipri, majistra Yanik. Li pale ak yon madanm ki pa jij, m tande l rele l Keti ou byen Ketli.

Li te bò 2 zè apremidi jij Sèj di nou prale kabarè, soti kabarè pou n ale lestè. Lè nou rive lestè, li pran madanm li, pitit li Jesika pou nou retounen kabarè, paske jij Sèj te di l pral mennen madanm li kay doktè samdi13 jiyè 2013 nan maten.

Pandan lannuit la, mwen pa dòmi nan menm chanm lan ak Sèj, se Jesika pitit fiy li a, ki gen 11 lane, ki vin rele m nan chanm kote m ap dòmi an, bò inè di maten pou l di m papa l malad. Lè m desann jij Sèj di m l ap mouri, li pa ka pale byen, l ap pèdi langaj li, li poupou sou li, li pipi sou li, li sye anpil, zye l koule dlo, li di l pa wè byen, li wè doub, li eseye pran papye pou l ekri, li pa ka ekri, men l lage, li vin pèdi konesans. Madanm li gentan fè demach machin lapolis. Lapolis di yo pa gen gaz nan machin yo, se nan machin jij Sèj nou blije monte, se pote nou pote jij Sèj ki kontinye poupou sou li, li vomi nan machin li, sou tout rad li ak sou rad nou k ap pote l la. Nou te prale ak li nan lopital Petifrè, men polisye a di lopital Bèna Mez pi pre. Nou rive nan lopital la bò 2 zè edmi dimaten. Yo konsilte l, yo fè analiz pou li. Se sèl souf jij la k ap monte. Apre yo fin fè analiz la, yo di l pral mouri. Se bò 7 tè edmi nan aswè jou samdi 13 jiyè 2013 la jij la mouri nan lopital Bèna Mez. Apre lanmò a, fanmiy lan deside pran mò a pou n rantre ak li lestè pou n mete l nan mòg "Merite". M pa konnen ki kote mò a ye konnyè a.

Ketly Julien, responsable de IMED, a rencontré la Commission vers 11h30 du matin le 19-07-2013. Elle déclare :" Nan kad apui ak kabinè enstriksyon yo pou yon òganis founi materyèl biwo ak sèvis entènèt, mwen te twouve m nan tribinal premye enstans pòtoprens la jou vandredi 12 jiyè 2013 bò midi edmi konsa. Jij Sèj te nan kare dwayen an, lè m kwaze ak li. Lè m gade l, li di m li bezwen m ijan, jodya menm. Mwen al fè ti pale ak li nan koulwa a. Mwen di l : m pa konprann vizaj ou, sanble w malad, ou merite yon ti repo. Mwen wè vizaj li blèm, tankou yon moun ki fatige anpil. Mwen di l m pa ka rete. Li ensiste, li di m se jodya pou n pale. Mwen di l m ap retounen pita. Efèktivman mwen retounen, li te deja bò 2 zè edmi nan apremidi menm jou vandredi 12 jiyè a nan biwo jij Sèj. Grefye a te absan. Li di m te gen yon premye rankont nan semenn lan pou planifye yon lòt rankont ak minis jistis la nan biwo mèt Gari Lisad. Mwen reponn li : m pa kwè w te ale nan rankont la Sèj. Li di m : pitit, m nan ka, se bagay lanmò. Li di m, se pa sèlman mèt Gari Lisad ki te nan rankont la ak minis jistis la. Te genyen tou prezidan an Michèl Mateli, ak premye minis la Loran Lamòt. Li di se premye fwa m twouve m nan sitirasyon parèy. Li di pandan Michèl Mateli ap pale ak li, li fè eksprè krache ki soti nan bouch Mateli ap tonbe sou vizaj mwen, enpi l ap pase dwèt li devan vizaj mwen pandan l ap fè m menas, ak tout kalite pawòl pou eseye imilye m. Jij Sèj kontinye pou l di m, li eseye eksplike yo dosye a pa nan men l ankò, men yo egzije l pou l mete bout nan dosye a pou pita madi 16 jiyè 2013 la. jij Sèj rakonte m, se sèlman mèt Gari Lisad ki te yon ti jan pran pitye pou li, apre sa, tout lòt yo te agresif ak li. Pou sa ki konsènen Mateli, li te mechan ak anpil move pawòl. Alòs mwen menm Ketli, mwen mande jij Sèj, kòman li te fè ale nan rankont la. Li reponn mwen, se Dwayen Remon Jan-Michèl ki te konseye l, ki te akonpanye l, enpi se nan machin dwayen an ansanm ak dwayen an li te ale. Enpi li di m : Ketli, m santi m ka mouri. Gen bagay ki pi grav toujou, Se lòd yo pase dwayen an ki dakò pou dosye a fini madi 16 jiyè 2013. Sèj kontinye pou l di : Alò, m t ap gade kòman m te ka kontoune kesyon an, pou m te ka mande moun yo, kidonk 'Sofya ak Olivye Mateli, ansanm ak Minis yo pou yo ta desann nan tribinal la pou m ta fè yo peye amand si yo pa vini, enpi m ta chèche yon jan pou depoze dosye a. Alò, mwen Ketli, m pwopoze jij Sèj, pou m ekri tout deklarasyon l yo sou papye, mwen antann ak li m ap anrejistre l, m ap filme l enpi pou m gaye dosye a nan laprès pou pwoteksyon l.... Li dakò. Nou pran randevou pou m pase lakay li lestè jou samdi 13 jiyè 2013 bò 8 tè nan maten..... Anvan lè samdi 8 tè maten rive, mwen rele Jij Sèj, se yon dam ki reponn pou di Jij Sèj malad, li lopital. Alò mwen rele dwayen Remon Jan Michèl. Li pa reponn. Mwen rele l ankò, li pa reponn. Se jis dimanch 14 jiyè 2013 dwayen an rele m pou l di se legliz li te ye, se sa ki fè l pat ka reponn. Mwen tou pwofite di dwayen an, jij Sèj te gentan di m se li menm dwayen an ki te òganize rankont la, enpi se li menm dwayen an ki te akonpanye Sèj nan rankont la. Dwayen an pa reponn anyen. Li pito pale de dosye materyèl biwo ak entènèt nou te tanmen pale vandredi a. Mwen rele jij Bèna Senvil ki di m wi, li konfime se dwayen an ki mennen jij Sèj nan rankont lan. Jij Bèna Senvil menm dakò ak mwen fòk gen komisyon ankèt ki monte pou fikse responsablite yo....

Mwen menm Ketli, mwen pa t ap pale nan radyo. Se lè m tande deklarasyon dwayen Remon Jan Michèl nan radyo, kote l deklare pat janm gen rankont, mwen santi m endiye, se sa ki fè nan dat madi 16 jiyè 2013 mwen deside di tout sa m konnen de dosye a nan radyo. Mwen dispoze parèt devan tribinal pou m temwaye..

Maitre Samuel Madistin a été entendu par la Commission Sénatoriale le vendredi 19 juillet 2013. L'ancien Sénateur Madistin nous a rappelé qu'il avait déjà adressé une lettre dans laquelle il a témoigné par écrit, et par conséquent, 'il est prêt à se rendre au tribunal pour confirmer ses érits.

Maitre Samuel Madistin nous a dit que le Juge Jean Serge Joseph lui a confié que lors de la rencontre du jeudi 11 juillet 2013, dans un élan de sympathie et de pitié de Maitre Gary Lissade à l'égard du juge Serge, ce conseiller de Michel Martelly, a pris soin de compléter à la plume sa carte de visite qu'il a remise au Juge Jean Serge Joseph. Cette carte de visite existe.....

Maitre Madistin a attiré l'attention des membres de la commission sur un employé du parquet, dénommé Figaro, qui avait parlé à Serge. Le juge Serge a dit ceci à Figaro : " ou wè nan ki machin m monte, pou m soti, se nan machin dwayen an....."

Maitre Samuel Madistin nous a promis de nous aider à approcher la famille du regretté défunt pour les suites de l'enquête.

Doyen Raymond Jean Michel a été entendu par la commission sénatoriale le vendredi 19 juillet 2013 de 1 h 40 à 3 h 29. Donc pendant une période de 1 h 49 minutes. La commission s'est excusée du fait qu'elle s'est présentée pour lui demander audience, alors qu'elle avait déjà adressé une lettre de demande d'audience pour le lundi 22 juillet 2013. Alors, le doyen a appelé un responsable de la CSPJ pour demander l'autorisation de recevoir la commission. L'autorisation a été accordée au téléphone, par Maitre Elibert de la CSPJ.

Le doyen a déclaré : " mwen resevwa nou ak yon doub chapo : kòm majistra asi, ak kòm administratè...

Asiz kriminèl louvri nan dat 08 jiyè 2013. Jij Sèj vini kote m pou l di m li bezwen m nan dat madi 9 jiyè 2013 nan biwo m pandan m ap resevwa jire yo ak tout difikilte sa reprezante. Jij Sèj ensiste pou l di m se ijan, enpi se konfidansyèl, paske se yon sitiyasyon ki dwòl.. Li te anviwon 10 zè 30 nan maten.. Mwen pwopoze l pou n ale yon kote pou n pale, san sekirite, san chofè. Nou ale, bò midi edmi konsa, nan tèminis ri pave nan ansyen tribinal travay la. Jij Sèj rakonte m li viktim de otorite deja, kote nou ye a pa ofri ase sekirite pou n pale, pito nou ale lòt kote. Alò, mwen ale ak li nan rèstoran Table de Cajus, dèyè mize a. Jij Sèj poze m kesyon pou l mande m, èske m pa resevwa okenn kout fil. Mwen reponn : non. Jij Sèj di m Mèt Nyoutonn Senjis ak mèt Andre Michèl evoke atik 400 an, sepandan avoka gouvènman an pa replike pou di pèsonaj sayo pa ka deplase konsa. Lè n fin pale, nou retounen nan pakè a, nou pa manje nan restoran an.

Nan dat mèkredi 10 jiyè 2013, bò inè apremidi, batonye a di nou dwe fè yon bagay, paske ministè edikasyon dekrete alèt wouj lakòz ouragan Chantal. Mwen blije sispann tout odyans pou 48 èdtan. Mwen rantre lakay mwen bò 3 zè edmi nan apremidi. Radyo m koute, se radyo Alelouya FM.

Nan dat jedi 11 jiyè 2013 bò 9 vè nan maten, CSPJ rele m pou l otorize m reprann aktivite tribinal la. Nan anviwon 10 zè edmi nan maten, CSPJ rele ankò pou verifye si m rive nan tribinal la.

Bò inè edmi pou rive 2 zè apremidi, Jij Sèj rele m, li di m l ap vini kote m. Li te nan biwo a deja denpi maten, li te ale. M pat wè l. Lè jij Sèj rive nan pakè a, li te bò 3 zè 25 apremidi, li gare machin li. Mèt Rigo Diplan te nan pakè a, men l pat wè m. Bò 3 zè 35 nan apremidi, jij Sèj monte nan machin mwen, enpi l di m ann ale menm ti kote a ankò, kivledi nan restoran Table de Cajus. Jij Sèj poze m menm kesyon an ankò, èske m pa janm resevwa okenn apèl ni dirèk ni endirèk ki soti nan pouvwa egzekitif la. Mwen reponn li : non. Nou pase apeprè 15 a 20 minit nan paking restoran an ki pat gen anpil machin, enpi nou retounen nan pakè a. Nou pa janm rantre anndan restoran an. Lè n retounen, mwen depoze jij Sèj nan paking tribinal la, enpi 2 mesye yo ki te ak li yo mete yon sak ki gen 10 mamit diri, soti nan machin li pou mete nan machin mwen.

Nan dat vandredi 12 jiyè 2013, bò inè edmi nan apremidi, mwen rankontre nan pakè a ak Ketli Jilyen ansanm ak Jaklin Chal, moun Miyami Erald sou pwojè finansman materyèl biwo ak entènèt. Se IMED ak USAID ki ofri finansman an. Jij Sèj rantre plizyè fwa omwen 7 a 8 fwa nan biwo a pandan m ap pale ak medam yo.

Vè 3 zè 25 nan apremidi menm jou vandredi 12 jiyè a, jij Sèj rele m pandan m te nan tribinal la, pou l di m li ale lestè. Li bay mwen nimewo telefòn prive madanm li. Mwen kite biwo m bò 4 trè edmi pou rive 5 kè apremidi, enpi mwen rive lakay mwen bò 5 kè edmi pou rive 6 zè aswè. Ant 6 zè edmi ak 7 tè aswè mwen ale legliz. Se nan legliz batis Chekina, nan dèlma 33 m mache. M pa konn bwè gwo alkòl, menm konn bwè ti byè Prèstij mwen, ak yon byè ki rele "prezidennte"

Nan dat samdi 13 jiyè 2013 nan maten mwen mennen madanm mwen al priye gantye boje. Mwen rele jij Sèj, mwen pa jwenn li. Mwen rele ankò, se yon vwa fanm ki reponn, se madanm jij la ki di m jij la mete telefòn li nan chaj, lè l retounen l ap rele m, li te deja 9 vè 30 nan maten. Mwen rele ankò, san repons. Apre m ensiste, yo reponn mwen pou di m jij Sèj lopital Bèna Meuz. Lè sa li te 11 zè edmi nan maten. Mwen di m ap vin wè l lopital la. Antretan, mèt Madisten rele m pou l enfòme m sou maladi jij Sèj, li di m se emoraji ki pi pre lanmò. Bò 8 tè 45 nan aswè yo rele m pou di m jij Sèj mouri. Mwen rele mèt Madisten ki konfime m lanmò a.

Dimanch 14 jiyè 2013, mwen rele Ketli Jillyen ki di m jij Sèj te di l se mwen ki te mennen l nan yon rankont ki gen prezidan Mateli ladan l, alòske se pandan 2 sèl fwa m rankontre ak prezidan Mateli. Se nan dat 17 oktòb 2012 nan seremoni pon wouj la ak nan dat 26 desanm 2012 pou m te al salye prezidan an. Anplis, mwen jij denpi lane 2001, mwen ponkò janm ale nan kabinè mèt Gari Lisad. Mwen nome sibstiti komisè pòtoprens nan dat 9 oktòb 1976, apresa nan tribinal travay nan dat 10 jen 2001, apresa jij syèj nan tribinal sivil nan dat 31 janvye 2003, enpi m nome dwayen nan dat 16 mas 2012. M pa janm konnen jij Sèj soufri okenn maladi.

Maitres Bernard St. Vil et Berge O. Surpris, juges au Tribunal de Premiere Instance de Port-au-Prince, ont été entendus par la commission sénatoriale le 19 juillet 2013. Ils ont déclaré : Jij Sèj te ale nan rankont la. Nan rankont la, jij Sej di se yon sèl moun ki te mwen agresif, se mèt Gari Lisad, apresa tout lòt yo te brital. Li manifèste dezi pou l retounen kanada. Li te mande pou l syeje madi 16 jiyè 2013 pou l te eseye retounen sou desizyon l te deja pran. Li te mande nou konsèy si l posib pou l retounen sou desizyon an. Nou te di l li pat dwe ale nan reyinyon an. Jij Sèj te panike, li pale ak tout moun sou dosye a, menm moun ki pa nan domèn dwa. Li rele Fanfan. Gen plizyè moun ki te wè lè l te prale nan reyinyon an, tankou Fatal, tankou polisye Djonni

Rachelle Acélat Joseph, épouse du Juge Jean Serge Joseph, a été entendue par la commission le 20 juillet 2013 à l'Estère. Elle a beaucoup hésité à s'exprimer puisqu'elle a peur pour sa sécurité et la sécurité de sa fille Jessica, dont le père est le Juge Jean Serge Joseph. Après avoir été mise en confiance par la commission, elle déclare : " nan dat jedi 11 jiyè 2013 la, Sègo al nan travay. Li rele m bò 2 zè apremidi pou l di m li pral nan reyinyon lakay mèt Gari Lisad, pou l al rankontre ak minis jistis la. Mwen di l pa ale. Li di m pa enkyete m paske se dwayen an k ap mennen l, li fè dwayen an konfyans. Lè l sot nan rankont la, li rele m bò 7 tè aswè. Nan aswe jou jedi a Sègo rele m li di m li pa ka rakonte m sa k pase nan reyinyon an kounye a paske li sispèk gen moun kap koute sa lap di nan telefòn li an. Li dim lap prete yon lot telefòn pou l ka rele m. Li al dòmi kabarè.

Vandredi 12 jiyè 2013, Sègo al nan travay. Lè l vin chèche nou lestè nan apremidi, menm vandredi 12 jiyè a, moun ki te nan machin lan, se mwen menm madanm li, m chita dèyè ak pitit nou an Jesika, ansanm ak Andèson ki te vin desann machinn lan lè l rive boudèt, enpi ti Sourit chita devan. M te gen pou m ale kay yon doktè dèmatològ nan samdi maten 13 jiyè. Denpi vandredi apremidi li te kòmanse rakonte m sa k te pase jou jedi nan reyinyon an. Li di m nan apremidi jou jedi 11 jiyè a, dwayen an bouke rele l pou mande l kote l ye, paske moun yo ap tann li. Li di m, li mande dwayen an ki kote moun yo ap tann li, eske se nan pakè a. Dwayen an reponn pou di non se pa nan tribinal la, se nan kabinè mèt Gari Lisad. Lè Sègo rive nan tribinal la, li di m dwayen an te deja sou volan machin li, enpi dwayen an di l pa ka ale ni ak chofè ni ak sekirite. Li di m se yo 2 sèl ki te nan machin lan. Ti Sourit ak Djonni rete ap tann li nan pakè a. Li di m lè l rive nan reyinyon an li wè mèt Gari Lisad, minis Jistis la Jan Renèl Sanon, Michèl Mateli, Loran Lamòt ak mèt Vandal. Li di m, Mateli agrese l pou l di l : ki bò w konn wè madanm ak pitit prezidan al jije. Minis jistis la li menm, li di se mèt Vandal ki lakoz, paske l te mal plede dosye a. Sègo di anfas presyon l ap pran, li blije dakò l ap fè yon koreksyonèl espesyal pou pase dosye a jou madi 16 jiyè 2013 la. Lè l fin dakò a, mesye yo mande l kisa l ap bwè. Li reponn li pa bezwen anyen. Dwayen an di : « ou ka bwè yon ti bagay, paske m konnen w renmen Sòmting. » Mwen di l, li pat dwe bwè ni manje nan men moun sayo. Enpi l reponn pou l di m : mwen deja bwè l. Apresa Sègo di m li pa santi l ka kontinye rete dòmi menm kote li abitye dòmi yo, li santi lavi l andanje, li vle retounen ale nan peyi kanada. Anvan l te kite rankont la, Sègo di m mèt Gari Lisad renmèt li yon ti kat ki gen adrès ak nimewo telefòn li. Mèt Gari Lisad ekri ak bik, yon nimewo espesyal sou kat la menm lè a, anvan l renmèt li kat la.

Nan aswè vandredi a, li te vle nou ale nan relasyon seksyèl, men m pat vle. Mwen kouche sou yon ti kabann ak Jessica, Sègo li menm, li kouche sou yon lòt kabann tou pre. Pandan lannuit la, bò inè dimaten konsa, Sègo leve pou l al pipi, m tande bokit la tonbe yon premye fwa, pandan l bese pou l pran bokit la, bokit la tonbe ankò. Mwen gentan leve pou m soutni l, paske l panche pou l tonbe, mwen mete l sou kabann mwen te kouche a. Lang li vin lou. Mwen rele mèt kay la ki rete tou pre. Mwen fè Jesika gentan al rele ti Sourit ki dòmi nan chanm anlè a, enpi m ale nan komisarya polis la pou m jwenn sekou pou m jwenn machin pou mennen m ak Sègo lopital. Machin polisye yo pa gen gaz, mwen bay yo kle machin Sègo a. Pandanstan, Sègo poupou sou li, li vomi, li sye anpil. Mwen rele plizyè nan fanmiy li ki nan peyi kanada ak nan peyi dayiti. Gen nan fanmiy ki di m ale nan lopital kanape vè ak li, gen lòt ki konseye m ale lopital Petifrè ak Sè ou byen lopital kominotè. Gen yonn nan polisye yo nan machin lan ki di m lopital Bèna Meuz la pi pre, al ladan l pou premye swen.

Chak ane Sègo toujou fè tout kontwòl kò l. Li pa janm soufri ni tansyon, ni sik, ni kolèstewòl. Doktè Sèj Vètilis konn kontwole tou.

Lè l rive lopital Bèna Meuz la, li kontinye vomi, yo pran san pou fè analiz, yo di l pa soufri sik ni kè, se tansyon l ki wo. Yo bay li piki, yo mete sewòm pou li. Sègo mouri, Sègo pèdi lavi l

Mezanmi, se mwen ak Jesika ki pèdi.... Tanpri ede m jwenn jistis souple.....

8- Fritz Joseph, entendu le 20 juillet 2013, est le frère ainé du juge Jean Serge Joseph. On s'est entretenu sur la sécurité du cadavre du juge et du processus devant aboutir à l'autopsie médico-légale. L'entente familiale a conclu la nécessité que l'autopsie soit réalisée aux Etats-unis et/ou au Canada. Il parait que certains membres du gouvernement haïtien ont tout fait pour récupérer de force, le cadavre du juge. A un certain moment, il y a eu de sérieuses contrariétés empêchant le cadavre de partir pour l'étranger. Ce 20 juillet 2013, le cadavre n'avait pas encore quitté le teritoire haïtien.

9- Docteur Serge Vertilus a reçu la commission le samedi 20 juillet 2013 à Saint-Marc. Le médecin a confirmé que le Juge Jean Serge Joseph n'a souffert d'aucun trouble métabolique ni de problèmes cardio-vasculaires depuis plusieurs années qu'il joue le rôle de médecin de la famille. Le médecin a été voir le Juge Jean Serge Joseph à l'hopital Bernard Meuz. Il a constaté une hémiplégie, qui correspond à une atteinte de l'hémisphère cérébrale. Un autre médecin de l'hopital a essayé d'interpréter un cliché de CT Scan qui correspondrait au patient Jean Serge Joseph, comme une plage ayant envahi presque tout l'hémisphère cérébral droit.

10- Maitre Jean Wilner Morin a été entendu par la commission sénatoriale le 22 juillet 2013 au Palais de Justice qui nous a déclaré : "Biwo m twouve l anfas biwo Jij Sèj. Biwo jij Sèj toujou rete louvri lakòz li pa gen klimatizè. Jij Sèj toujou rive nan biwo anvan m puiske l ap soti kabarè, li souvan pran bonè. Mwen menm se bò 8 tè 30- 9 h nan maten m rive.

Denpi apre desizyon l te pran pou mande fanmiy Mateli ak minis gouvènman an parèt nan tribinal, jij Sèj toujou ap mande m si desizyon an kòrèk. Mwen di l desizyon an bon. Mèkredi 10 jiyè 2013, jij Sèj di m dwayen an envite l nan yon rankont nan kabinè yon mèt avoka, ak lòt moun eske l ka ale. Mwen konseye l pou pa ale nan rankont la. Bò inè apremidi menm mèkredi 10 jiyè a, li di m li fenk sot pale ak mèt Madisten li di m ki pa opoze ak rankont la, puiske se otorite peyi a, nou kapab toujou dyaloge. Mwen pa rankontre ak li nan jedi 11 jiyè a.

Vandredi 12 jiyè 2013, m t ap pran syèj nan tribinal ti moun, nan ri Petyon. Lè m rive, sal la pa klimatize, m pa ka rete. Mwen deside retounen vin jwenn dwayen an nan pakè a pou l regle zafè syèj la. Mwen tou rankontre ak ansyen komisè Manès ki rele m pou l di m konsa : ou pa tande Sèj te ale nan yon rankont ayè jedi 11 jiyè a ansanm ak dwayen ak yon bann lòt otorite ki fè l menas ak gwo presyon ?. Lè m kwaze ak Sèj, mwen santi l panike, enpi l di m : mon chè, se wou ki te gen rezon, m pat dwe ale nan rankont la.

Lè m rive kote dwayen an, menm jou vandredi 12 jiyè a, m tou pwofite di dwayen an mwen okouran li te mennen jij Sèj nan yon rankont sou dosye mèt Nyoutonn lan ak lòt moun, enpi m konnen rankont la te mal pase. Dwayen an reponn mwen pou l di : se pa konsa sa te pase, m ap rele w, pou n pale sou sa. Dwayen an pa janm rele m. Se pou rezon sa, lè m vin tande jij Sèj mouri, mwen mande konvokasyon asanble jeneral jij yo.

Lè m rive nan odyans la, mèt Vye mande m depòte m de dosye a. Mwen dakò, mwen deside rantre lakay mwen. Se nan samdi 13 jiyè 2013 nan apremidi, yon ti fanmiy mwen aprann mwen lanmò jij Sèj. M rele yon lòt jij pou konfimasyon. Ansyen komisè Gasan konfime lanmò a. Mwen rele dwayen an plizyè fwa, li pa janm reponn telefòn.

Nan dimanch 14 jiyè 2013, bò 3 zè apremidi, dwayen Remon Jan-Michèl rele m pou l di m li te legliz, se sa k fè l pat ka reponn telefòn. Dwayen an di m li tande y ap di anpil bagay sou lanmò jij Sèj la. Lè m mande l eksplikasyon, li reponn mwen pou l di : jij Sèj te vini kote l pou l mande l konsiltasyon sou dosye a. Alò, pou evite twòp monte-desann, li ale ak jij Sèj nan yon restoran pou yo pale. Lè yo fin pale, yo retounen nan tribinal la. Dwayen an kontinye pou l di m li sezi tande yo di prezidan Mateli te menm fache nan rankont la, enpi se dwòg li blije konsome pou l kalme.

Se tout sa m konnen de dosye a....

11- Le ministre de la justice, Me Jean Renel Sanon, qui avait été prié par la commission sénatoriale de se faire accompagner par les responsables de l'USP, de l'USGPN, de la CAT TEAM, n'avait pas informé le directeur de la Police qu'il devait avertir ces responsables. Le directeur de la Police a confié que le ministre de la justice ne lui avait pas mis au courant. Au cours de la rencontre, le directeur de la police a même essayé d'appeler au téléphone ces responsables. Mais, le ministre de la justice lui a demandé de ne pas insister, parce que ces responsables sont probablement partis avec Michel Martelly pour le cap-haïtien ce lundi 22 juillet 2013.

Le ministre de la justice déclare : " m tande nan radyo, yo di m te prezan nan rankont nan biwo mèt Gari Lisad, kote jij Jan Sèj Jozèf ta patisipe. Se yon rankont imajinè. Se yon revelasyon post-mortem, se yon plezantri, se yon blag. Yo menm di jij Sèj ta pote diri pou mwen. Enpi, yon rankont konsa, omwen mèt Vandal, avoka fanmiy lan ta dwe prezan.

Jij Sèj te desezi de dosye a, alò m pa wè pou ki sa m ta enterese ak jij Sèj.

Anplis, Gari Lisad, se yon avoka, pou ki sa m ta oblije ale nan biwo l pou yon rankont, m te ka envite l nan biwo m. Menm si m konnen adrès kabinè mèt Gari Lisad, ri dèyè rezèvwa, tou pre ministè planifikasyon an, m pa janm ale nan kabinè mèt Lisad ni lè m te avoka, ni pandan m minis jistis.

M te pale ak dwayen Remon Jan-Michèl, li di m li pat okouran de okenn rankont konsa. M pa sonje ki dènye fwa m rankontre ak dwayen an. Antouka, n pat rankontre ak dwayen an jou jedi 11 jiyè 2013 la.

Pou sa ki konsènen nominasyon jij Sèj, se minis Pòl Deni ki te nonmen l, se pa Mateli ki te nonmen jij Sèj. M pa di Mateli fè manti paske l di se li ki te nonmen jij la, men se sou gouvènman Preval la jij Sèj te nonmen."

Se samdi 13 jiyè 2013 nan aswè m te okouran de lanmò jij Sèj.....

Maitre Lamour, accompagné de maitre Théodore nous a confié :" nan dat vandredi 12 jiyè 2013 bò 10 zè edmi pou 11 zè nan maten, mwen ale nan pakè a, mwen rankontre ak mèt Moren ki mete m okouran de pakèt presyon jij Sèj sibi nan rankont li te patisipe ayè jedi 11 jiyè a nan kabinè mèt Lisad, ansanm ak lòt otorite egzekitif la. Lè m rive nan biwo jij Sèj m wè l piye sou biwo l, l ap pale ak mèt Madisten. Mwen te akonpanye ak yon moun. M santi se yon pawoli konfidansyèl, m pa rete nan biwo a. Pandan m deplase, se Sèj ki rapousuiv mwen pou l di m bagay yo rèd, pouvwa a fache anpil kont li ak kont dwayen an. Yo di yo fache ak dwayen an, paske l distribiye dosye a bay jij ki pa jij pouvwa a. Jij Sèj di m Mateli ak Loran Lamòt fache paske yon jij vle voye madanm ak pitit prezidan nan prizon. Yo egzije pou dosye sa fini wèpawè jou madi 16 jiyè 2013. Jij Sèj di m se nan kabinè Gari Lisad rankont la dewoule, men Gari Lisad ak minis jistis la pat agresif ak li, se Mateli ak Lamòt ki te agresif. Jij Sèj di m, anvan l deplase, mèt Gari Lisad renmèt li kat vizit li. Jij Sèj te montre grefye Sajès kat vizit la. M konstate jij Sèj te panike anpil.

Samdi 13 jiyè nan maten, mèt Manès rele m pou l di m jij Sèj fè yon Stwok, li lopital. Li di m, ou wè kòman nèg yo anraje. M rele mèt Madisten samdi swa ki konfime m Sèj mouri. Mèt Madisten di m l ap pran responsablite l pou l denonse fè a.

Nou pa dwe bliye, lè yo te bay komisè Lyonèl Konstan Bobren, aktyèl direktè egzekitif CSPJ a, lòd pou l arete Gayo Dòsenvil, se nan kabinè Gari Lisad pouvwa a te konvoke mèt Bobren pou fè djòb sal sa. Pami moun ki te nan rankont sila, te gen : premye minis Gari Koniy, Gari Lisad, minis jistis la, minis zafè etranje a ki se Loran Lamòt ak mèt Bobren. Lè sa a, mèt Bobren te deside renmèt demisyon l, olye l te vyole lalwa. Se lè sa yo te nonmen jan Renèl Senatis komisè.

La commission sénatoriale s'est rendue à l'hopital Bernard Mevs pour rencontrer les responsables de ce centre de soins, dont les Dr. Jerry et Marlon Bitar, et Dr. Ariel Henry. Nous avons visité les divers services de ce centre, particulièrement l'accueil, qui nous paraissent fonctionner selon les principes de déontologie médicale.

Le patient Jean Serge Joseph a été admis à l'hopital le samedi 13 juillet 2013 à 3 heures du matin par Dr. Linda Théodore. Le patient a été rapidement pris en charge par les services d'urgence. Il était en coma profond, avec myosis bilatéral.

Selon l'anamnèse effectuée par le médecin de garde, à partir des parents du patient, il n'y a pas eu d'antécédants personnels d'hypertension artérielle, ni d'autres troubles métaboliques nécessitant un suivi médical régulier.

Nous avons lu les images de CT SCAN de la boite cranienne, montrant un hématome intra-cérébral, avec oedème péri-lésionnel correspondant à une massive hémorragie cérébrale gauche, avec compression ventriculaire.

Le diagnostic d'Accident Vasculaire Cérébral hémorragique gauche est posé. Cet A.V.C. provenant probablement d'une hypertension artérielle, étant de pronostic très sombre, n'a pas pu être l'objet d'une intervention chirurgicale, selon l'avis des experts présents, compte tenu de l'état clinique et du bilan des examens pré-opératoires. Malgré tous les soins intensifs, et les tentatives de réanimation, le patient Jean Serge Joseph est décédé ce samedi 13 juillet 2013 à 8 heures du soir.

Les médecins et techniciens de l'hopital n'ont pas pu se prononcer sur aucun évènement qui pourrait éventuellement précéder ou provoquer la poussée ou la crise hypertensive ayant conduit à l'installation de l'Accident Vasculaire Cérébral.

La commission sénatoriale salue l'esprit d'ouverture des responsables de l'hopital Bernard Mevs qui ont offert à la commission, leur totale et franche collaboration.

La commission sénatoriale a entendu le mardi 23 juillet 2013, maitre Joseph Manès Louis qui a déclaré : " nan dat 10 jiyè 2013 jij Sèj rele m pou l di m li bezwen m. Mwen reponn li m ap pase kote l kabarè.

Nan dat jedi 11 jiyè, mwen pale nan telefòn ak mèt Moren, ak mèt Bobren ki di m rankont ant jij Sèj ak otorite yo te fèt kay Gari Lisad. Mwen pale tou sou dosye a, ak Fito ki se vwazen ak pwopriyetè kay kote Sèj rete a.

Vandredi 12 jiyè 2013, Fito di m li wè Sèj, li pale ak Sèj ki di l kòman li regrèt li te ale nan rankont la, paske l santi l pa byen menm. Nan apremidi, Sèj soti lestè ak madanm li ak pitit li. Rive aswè, li pran zam ki te nan men sekirite l la.

Samdi 13 jiyè 2013 lè m aprann Sèj malad, li ale lopital Bernard Mevs, mwen desann nan lopital la bò 10 zè nan maten pou m al wè l. Men lè m rive nan lopital la yo di m se pa lè vizit.

Analyse des Données recueillies lors des Auditions des Témoins et Acteurs de l'Evénement

De l'analyse des données fournies par les témoins et acteurs de l'évènement entendus à l'occasion des auditions tenues tant au sénat de la république que dans d'autres espaces selon la personne à auditionner, sa disponibilite et le degré de sérennité nécessaire pour l'audition et le déroulement de l'enquête en général. Les différents témoins et acteurs auditionnés nous ont permis de comprendre qu'à partir du mardi 02 Juillet 2013, le juge Jean Serge Joseph, ayant pris la décision de citer à comparaitre des grands commis de l'Etat, a donné une impulsion toute particulière à une affaire en apparence banale, mais qui avait toutes les possibilités d'imposer un virage à 180 degrés aux faits et gestes légaux et politiques en Haiti. Il faut signaler que dès le départ, la famille présidentielle a pris très au sérieux la dénonciation portée par maitre Newton Louis Saint Juste devant le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince, maitre Jean Renel Senatus, faisant état de corruption et de concussion aux plus hautes sphères de l'Etat, indexant à l'occasion l'épouse et le fils du président de la République.

La présidence s'est retrouvée dos au mur quand « la femme de Cesar a été vue nue. » Il fallait sortir de l'impasse. Et pour ce faire, tous les moyens étaient corrects et toutes les troupes étaient mobilisées.

Une affaire qui peut paraitre simple aux yeux de celui qui ne sait pas trop ce que sont les méandres de la politique. Mais compliquée pour qui sait lire avec des lunettes psychologiques les actions et réactions politiques dans un état dominé par le grand banditisme, le mépris du droit et l'indécente impunité. Qui sont-ils les acteurs impliqués dans cette affaire ?

I.- Il s'agit en tout premier lieu de Me Newton Louis Saint Juste. Jeune et brillant avocat de la capitale, il a pris sur lui d'initier une action en justice contre ce qui à ses yeux lui parraissait inacceptable. Beaucoup de personnes en parlaient certes, mais très peu de gens pensaient à faire quoi que ce soit à propos de l'affaire.

II.- Mais l'affaire a vite été classée sans suite par le commissaire du gouvernement d'alors Me Jean Renel Senatus. Elle a rebondi en Septembre et a trainé quelque temps avant de recevoir une impulsion particulière de la part d'un citoyen dénommé Enold Florestal qui a fait une citation au correctionnel.

III.- Quand le 02 Juillet 2013, le juge Jean Serge Joseph, en charge de l'affaire a sorti son jugement avant dire droit, un peu tout le monde a commencé à pressentir une tempête juridico-politique. Suivent quelques jours plus tard l'appel de Me Vandal et du commissaire Délille. Mais on se souviendra que l'affaire n'a pas été rien qu'une simple action en justice. C'était une affaire éminemment politique. Alors des moyens politiques devaient etre utilises pour obtenir des résultats probants.

IV.- C'est ainsi qu'entreront en jeu les grands négotiateurs qui a partir du mardi 09 Juillet 2013 imprimeront un autre cours a la reponse de la famille presidentielle. Dans cette saga juridico-politique, certains se positionnaient pour marquer des points politiques, alors que d'autres se trouvaient en position de perdre de serieux points politiques : mais tous sur le terrain du droit. Alors, ceux qui envisageaient la possibilite de perdre des points avaient tout de suite compris qu'il fallait utiliser meme en apparence le terrain du droit pour éviter de perdre. L'avocat de la famille présidentielle ayant fait une piêtre prestation raconte-t-on, il fallait dans cette opération à la fois étriquee, compliquée et périlleuse faire appel aux gros cylindrés.

Aussi, les services d'un grand cabinet ont été requis pour agencer et coordonner les lignes d'attaque de l'équipe menée au score.

V.- Le rôle du cabinet de Me Gary Lissade doit être compris dans sa dimension historique. Ce cabinet a déjà été utilisé par les services gouvernementaux quand il fallait exercer des pressions sur le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince d'alors Me Lionel Constant Bourgoin. Il avait été demandé à celui-ci de proceder à l'arrestation de Mr Gaillot Dorsainvil, ancien président du Conseil Electoral Provisoire qui avait organisé les élections aux cours desquelles Mr Michel Joseph Martelly est parvenu à la présidence du pays. C'est dans ce cabinet qu'a eu lieu la reunion à laquelle avaient participé le Premier ministre d'alors (Gary Conille), son ministre de la Justice (Michel Pierre Brunache), son ministre des Affaires etrangeres (Laurent S. Lamothe), le commissaire du gouvernement près le Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince (Lionel C. Bourgoin), etc. Ce cabinet semble être le lieu de prédilection des grands complots contre l'état de droit en Haiti. La commission a eu la chance et le privilège d'avoir l'actuel Premier ministre Laurent S. Lamothe accompagné de plusieurs membres de son cabinet dont Michel Pierre Brunache. Tous ont confirmé avoir participé à une réunion à ce cabinet du temps où l'un était minstre des affaires étrangères et l'autre ministre de la justice. Ils n'ont certes pas precisé les raisons de cette réunion en dehors des locaux de l'administration publique. Mais tout le monde sait que par la suite le commissaire Bourgoin a du démissionner de son poste car il avait refusé de souscrire aux demandes de ses supérieurs du moment.

VI.- L'on comprendra surement quelle expertise ce cabinet a du developper dans la gestion des dossiers gouvernementaux à scandale. Me Lissade, ayant en sa possession un badge de consseiller juridique du président, se doit de justifier son titre et peut être son salaire. Il doit trouver la sortie juridique d'un dossier jugé politique. Mais, y avait-il un détour juridique possible dans un dossier où le juge en charge a déjà émis un jugement avant dire-droit ?

Deux choses sont à retenir ici. A) Le dossier présente une image pas trop propre du président de la République, de sa famille, et de son administration. Il fallait en finir au plus vite pour passer de cette distraction à autre chose. Mais l'affaire allait durer, car les tribunaux étant en vacance avec l'ouverture des assises criminelles le 08 Juillet 2013, l'appel interjeté et par le Parquet et par l'avocat de la famille présidentielle ne serait entendu qu'en Octobre à la réouverture des tribunaux. On courait alors le risque d'endurer le supplice des gorges chaudes pour environ trois mois encore. Donc, il fallait trouver le détour juridique pour sortir au plus vite de l'imbroglio juridico-politique. Ainsi, le ministre de la justice a confirmé au cours de son audition qu'il y avait une sortie juridique simple. Les parties qui ont fait appel feront le retrait de leur appel. Ils adresseront une requête au doyen du tribunal de Première Instance pour lui demander un rejugé. Le doyen prendra une ordonnance abréviative demandant au juge un siège spécial pour entendre l'affaire à nouveau et ainsi obtenir ou bien que le juge se déporte de l'affaire ou qu'il émette un nouveau jugement qui renverrait la famille présidentielle blanchie de l'affront de la plainte.

VII.- Rien de tout cela ne peut se faire sans l'aval, le support et l'implication du doyen. Voilà pourquoi le doyen Jean Michel est-il devenu le personnage central de l'affaire. L'appel ayant été interjeté le 08 Juillet 2013, le mardi 09 Juillet 2013 le doyen Jean Michel entre en action. Il raconte à la commission que le juge est venu le trouver en son bureau pour lui poser une question. Mais c'était tellement sensible et confidentiel qu'ils ont dû tous les deux quitter les locaux du palais de justice pour aller en parler ailleurs. Ils sont d'abord partis vers les locaux de l'ancien tribunal du travail. Là, le juge déclare ne pas se sentir à l'aise et réclame un espace plus sécuritaire. Ils partent à nouveau vers le restaurant Table de Cajus au Champ de Mars. Ils n'entrent pas dans le restaurant, ils restent dans le vehicule (celui du doyen) dans l'aire de stationnement du restaurant. Aussi n'est-il pas possible de vérifier avec les tenanciers si ces deux clients remarquables avaient été reçus ce jour-là. Mais ils vont en ce lieu secret pour faire quoi ? Le juge, dit le doyen, n'avait qu'une seule question à lui poser : « Aviez-vous reçu des appels des gens du pouvoir exécutif concernant le jugement que j'ai rendu ? » Personne ne comprend en fait pourquoi cette question en apparence anodine n'aurait pas pu être posée au bureau du doyen. Mais en plus, le doyen affirme qu'ils sont restés là dans l'aire de stationnement du restaurant pendant vingt minutes pour cette seule question. Il faut croire comme le chante Garou que : « Le monde est stone. »

Cependant, le récit du juge à ses amis ose être différent de celui du doyen. Pour juge Jean Serge Joseph, il a été conduit à une rencontre avec les avocats de la famille en vue d'être persuadé de rencontrer le ministre de la justice aux fins de trouver une issue à la crise provoquée par son jugement avant dire-droit. Deux jours plus tard, le juge est conduit une fois de plus par le doyen, sans chauffeur ni agent de sécurité au même restaurant, à la même aire de stationnement. Toujours selon le doyen sur demande du juge. Définitivement, le juge doit avoir été victime d'une foudre amoureuse pour cette aire de stationnement. La conversation dure encore une vingtaine de minutes. Le sujet : la même question angoissante du juge.

Mais le récit du juge est différent. Il y a eu progression. Cette fois, il a été sommé de rencontrer le ministre de la justice qu'il a en maintes instances antérieures refusé de rencontrer. Le juge Joseph qui s'était rendu à son bureau ce jour-là mais est reparti très tôt car les locaux du palais de justice étaient pratiquement vides à cause de l'alerte rouge déclarée en raison du passage du cyclone Chantal. Il est retourné chez lui à Cabaret. Peut être pour fuir le doyen qui le harcelait d'appels téléphoniques. Il est environ 13 heures et il parle au téléphone avec son épouse. Le doyen appelle à nouveau, il répond et demande au doyen de lui accorder une heure avant de le rejoindre. Les appels du doyen se multiplient et se font plus pressants. On connait déjà la suite de l'histoire qui a déjà été exposée dans le point 17 de la section relative à la reconstitution des faits.

Que faut-il comprendre de tout cela ?

1) Que le récit du doyen est confronté à de graves difficultés de cohérence logique. a) Pourquoi un doyen qui a à sa disposition un bureau qui est censé protégé des intrusions des personnes non-invitées aurait-il senti la nécessité d'aller d'abord sur une galerie du local d'un ancien tribunal, et ensuite dans l'aire de stationnement d'un restaurant pour répondre à une simple question d'un juge ? Il est finalement revenu le temps des contes de fée.

b) Pourquoi cette si simple conversation aurait-elle duré vingt minutes quand la réponse monosyllabique à la question du juge n'aurait duré que l'espace d'une seconde ?

c) Pourquoi le doyen qui selon sa propre déclaration n'a pas l'habitude d'appeler le juge, n'est pas un ami proche du juge, l'aurait-il appelé, ne serait-ce qu'une seule fois ce jour-là ?

d) Comment expliquer que le doyen fût longtemps prêt, attendant dans son véhicule en marche l'arrivée du juge, si ce n'est rien que pour répondre à une question du juge aussi pressante et angoissante fût-elle ?

e) Pourquoi ne pas rester dans le véhicule et causer quand ce jour-là le palais de justice était pratiquement presque vide, donc sans grand risque d'être entendu ?

f) Mais, de plus, qu'était-elle cette conversation qui ne pouvait être entendue des intrus ?

g) Et le mardi 09 Juillet et le jeudi 11 Juillet 2013, les réunions qui ont eu lieu dans l'aire de stationnement du restaurant l'ont eu à la mi-journée, pourquoi sont-ils restés dehors et n'ont pas pensé à prendre le lunch ensemble ? Les différents récits du doyen le présentent comme quelqu'un qui pratique souvent les restaurants de la capitale.

h) Mais le vendredi 12 Juillet 2013, pourquoi le doyen qui a toujours été si prompt à répondre aux supplications du juge - qui semble-t-il était obsédé par l'idée que les autorités du pouvoir exécutif auraient pu mettre la pression sur le doyen pour qu'à son tour il la mette sur le juge afin que ce dernier revienne sur sa décision – n'a pas daigné recevoir le juge bien qu'il reconnût que celui-ci se présentât sept ou huit fois à son bureau ? Pourquoi ne l'a-t-il pas appelé ce soir-là bien qu'il recût du juge un numéro supposé inconnu du grand public ? i) Pourquoi ne l'a-t-il appelé que le samedi 13 Juillet 2013 vers les dix heures AM ? Et pourquoi le doyen a-t-il été si inquiet au point d'appeler plusieurs personnes afin de confirmer la mort du juge ? Ou encore pourquoi ne s'est-il jamais déplacé pour aller voir comment a été le juge durant les heures de son hospitalisation étant donné que dans les jours qui précèdent, il y a eu une telle complicité entre le juge et le doyen ?

j) Comment comprendre la réponse du doyen au juge Morin qui l'a vertement repris pour le fait qu'il a conduit le juge à une réunion au cours de laquelle le juge a été malmené. La réponse dialogique tombait : « Ce n'est pas ainsi que cela s'est passé. Je t'expliquerai plus tard. » De quel 'cela' s'agit-il ? Le fait d'être malmené ou celui de conduire le juge à une réunion ? Tout compte fait, il n'a jamais rien expliqué a quiconque.

k) Comment comprendre également que le doyen ait préféré contourner les remontrances de Madame Julien de l'IMED qui lui a reproché d'être à l'origine de la mort du juge par le simple fait de l'avoir conduit à cette reunion où il a été exposé a toutes sortes de pressions et de menaces ? Il a préféré tourner la conversation sur la question des matériels de bureau que Madame devait acquérir pour le tribunal bien que Madame Julien admette qu'elle était si dérangée par la mort du juge qu'elle a éconduit le doyen au cours de cette conversation.

2) Mais au delà du fait que le récit du doyen ne tient pas logiquement, certains éléments de son récit confirment d'autres points du récit du juge et qui sont contraires à son propre récit des faits.

a) Par exemple, le doyen admet que c'est lui qui a pris sur lui-même l'initiative d'appeler le juge dans la mi-journée du jeudi 11 Juillet 2013. Fait que le juge rapporte à tous ceux qui on reçu son récit. Ce fait apparemment anodin illustre bien la logique que le juge était pressuré de rencontrer des autorités autour du sujet du procès au correctionnel de la famille présidentielle. De plus, le juge a réfléchi ce matin jeudi 11 Juillet 2013 qu'il lui fallait parler à son épouse avant de se décider d'aller à la réunion. Son accompagnateur (Berlens) en fait un témoignage éloquent. Mais, plus que Berlens, le juge Jean Wilner Morin et Maitre Samuel Madistin confirment avoir été sollicités par juge Joseph pour leur conseil à savoir s'il était sage d'aller à cette réunion. Juge Morin a émis un avis négatif, mais Me Madistin n'y voyait pas d'inconvénient. Juge Joseph partage l'avis de Me Madistin avec juge Morin qui ne se prononce plus sur la question. Pourquoi juge Joseph aurait-il cherché et obtenu les conseils de ses amis sur la question ? C'est qu'il lui a effectivement été demandé d'aller rencontrer des autorités.

Notons en passant, que juge Joseph ne voyait aucun inconvénient à ce qu'il rencontre les avocats de la famille présidentielle. Mais quand la pression montait et qu'on lui proposait de rencontrer le ministre de la justice et autres personnalités du pouvoir exécutif, il a songé à l'indépendance du pouvoir judiciaire qui pouvait alors être mise en cause : il prend des consultations. Quand le doyen fait monter la pression pour dire au juge que les autres attendent, le juge se cramponne à son pouvoir et réclame timidement que ce soit au palais de justice. Mais le doyen insiste, il attend dans son véhicule en marche, il congedie chauffeurs et agents de sécurité, il prend les commandes de l'opération.

b) Un autre fait en apparence anodin mais révélateur. Le doyen confirme que le vendredi 12 Juillet 2013 le juge Jean Serge Joseph est venu à son bureau sept ou huit fois. Le juge Joseph confirme cette assertion dans son récit aux juges Bernard Saint Vil et Berge O. Surpris. Il leur explique en outre qu'il lui a été demandé de revenir sur sa décision, Pour ce faire, le doyen rendra une ordonnance abréviative le convoquant en urgence pour un siège spécial le mardi 16 Juillet 2013. Il dit au juge Saint Vil qu'il reconnait et respecte sa profonde connaissance du droit pénal haitien et des procédures pénales, quel était son conseil par rapport à la faisabilité de telle action. Le juge Saint Vil réplique qu'il se référait encore au conseil qu'il lui avait donné au tout début de l'affaire. De fait, au cours de cet entretien avec le juge Saint Vil, il confirme avoir été plusieurs fois au bureau du doyen pour retirer l'ordonnance en question. Mais il avoue aussi à ses amis qu'il siégerait ce mardi-là, se déporterait de l'affaire et partirait au Canada avec sa famille. Certains lui avaient conseillé de le faire avant mardi. Alors pourquoi le doyen n'a-t-il pas reçu le juge ce jour-là ? Pourquoi à chaque visite il répondait qu'il n'était pas prêt à le recevoir ? Cette fameuse ordonnance n'était pas encore rédigée ou corrigée ? Pourquoi en quittant le tribunal le juge a-t-il tenu à être joignable pour le doyen jusqu'à lui passer un numéro inconnu du grand public qu'il utilisait pour appeler son épouse ? Pourquoi le doyen n'a-t-il appelé que le samedi matin ? Etait-ce parce qu'à ce moment l'ordonnance était prête ? Et pourquoi n'a-t-il pas daigné rendre visite au juge à l'hôpital ? parce qu'il croyait en ce moment-là qu'il était en train d'être berné par un juge qui feignait une maladie diplomatique pour éviter de siéger mardi ? Pourquoi dans la soirée s'inquiétait-il à confirmer la mort du juge ? Parce qu'il était surpris par un curieux tour de la nature ?

Autant de questions auxquelles la seule réponse est que le doyen a lamentablement menti. Pourquoi a-t-il dû mentir ? Que voulait-il cacher ? Mais il n'est pas le seul à mentir, le ministre de la justice aussi a menti. Il a essayé d'avancer l'argument farfelu selon lequel une réunion aurait pu se tenir, mais le fait qu'on ait cité son nom comme participant à cette réunion signifie tout simplement qu'il n'y a pas eu de réunion du tout. Cela aurait pu être vrai dans un autre monde.

En effet, le ministre a confirmé sans le vouloir devant la commission qu'il y avait une raison pour que cette réunion ait eu lieu. Pour lui, technicien du droit, il était possible pour le juge de revenir sur sa décision. Comment ?

Les avocats de la famille présidentielle retireraient leur appel. Le commissaire du gouvernement aussi. Ils adresseraient une requête au doyen lui demandant un siège spécial pour un rejugé. Le doyen adresserait une ordonnance abréviative au juge qui prendrait un siège spécial en raison de la vacance judiciaire. Et alors, il pourrait rendre une autre décision. Et c'est exactement ce que le juge Joseph confie à ses collegues juges. Il lui a été demandé cela et rien de plus. Il a consulté le juge Saint Vil pour être conseillé sur la faisabilité de telle action. Cela n'implique pas encore que le ministre ait été présent à cette réunion.Cependant, dans les récits antérieurs à la réunion, le juge a confié à tous ses confidents que le doyen avait voulu qu'il rencontrât le ministre de la justice. C'est ce qu'il a confié à son épouse, à juge Morin, à Me Madistin. C'est ce qu'il a confié après la réunion à ceux auxquels il a raconté sa mésaventure. Au juge Morin il déclare : « Si j'avais suivi ton conseil, je n'aurais jamais essuyé tant d'humiliations. » A Madame Julien de l'IMED qui ne pouvait croire ses oreilles il confie : « Ces gens m'ont malmené. Seul Me Lissade a été tendre avec moi. » Quand Madame Julien insiste : « Et le ministre ? » « Il n'a pas été aussi arrogant que le president, mais il insistait pour trouver une solution juridique acceptable » répond-il. A son épouse inquiète qui s'enquiert : « Ne me dis pas qu'après que ces gens t'aient aussi malmené, tu as mangé avec eux ? » Et lui de répondre : « Il n'y avait rien à manger, j'ai simplement partagé un coup avec eux. »

Le ministre de la justice Me Jean Renel Sanon était bel et bien présent à la réunion.

Le président de la République aussi a menti. Il affirme qu'il n'avait pas à prouver qu'il n'était pas à la réunion mais qu'il revenait à ceux qui affirmaient le contraire de le prouver. Cela laisse supposer qu'il était là mais qu'il était la mais que tout le monde a reçu l'ordre de mentir à son sujet, et qu'ainsi personne n'allait pouvoir prouver qu'il était effectivement physiquement présent à cette reunion.

On se rappelle que dans le compte-rendu des auditions un rappel avait été fait quant au comportement du ministre de la justice qui n'a pas daigné informer le directeur général de la Police qu'il devait se faire accompagner par les responsables de l'USPN, l'USGPN, la CAT TEAM, le responsable de la sécurité présidentielle. Il ne l'a pas fait, essayant de soustraire ces responsables détenteurs de précieuses informations quant au calendrier des déplacements du président de la République. Par exemple, un des témoins raconte que le lundi 08 Juillet 2013, en rentrant à Port-au-Prince, le juge a été stoppé sur la route nationale # 1, à hauteur de l'Arcahaie, par une véhicule tout terrain, pick-up de couleur blanche. Il s'est arrêté un peu plus loin que l'autre véhicule qui se positionnait dans la direction du Nord mais sur le côté de la circulation allant vers le Sud. Ainsi, les deux véhicules se trouvaient sur le côté de la circulation allant vers le Sud. Alors, le tout terrain de couleur blanche qui se positionnait vers le Nord a fait demi tour et est revenu s'arrêter juste à côté du véhicule du juge. Le chauffeur fait baisser sa portière droite et s'adresse au juge qui a fait baisser sa portière gauche : « Tu m'empêches de dormir, pas vrai ? » Une conversation s'ensuivit au cours de laquelle de sérieuses menaces ont été proférées à l'égard du juge. Il arrive que ce chauffeur a été identifié comme étant le président Martelly lui-même. Il était au volant et avait deux agents de police en uniforme de l'USGPN à l'arrière. L'un d'eux a photographié les trois occupants du véhicule du juge. Après la série d'injures et de menaces, le véhicule est reparti vers le Sud, mais le juge eberlué ne pensait qu'à sa mort. Il a confié à son agent de sécurité Johnny et à son cousin Berlens qu'ils étaient sur le point de mourir. Ce jour-là, le juge qui ordinairement allait à son bureau en longeant la Route Neuve, puis le Boulevard La Saline et l'Avenue Harry Truman jusqu'au palais de justice au Bicentenaire, a du emprunter la nationale # 1 jusqu'au centre-ville évitant ainsi la Route Neuve puisque le chauffeur du véhicule de l'Arcahaie lui avait dit : « Je m'informe de tous tes déplacements, de tes horaires, et de tes démêlés. Tu ferais mieux de régler cette affaire au plus vite pour que ma famille retrouve son calme. Tu ne sais pas que j'aime mon épouse et mes enfants ? »

Alors, ce qui ressort de cette hypothétique rencontre, c'est ce qui a été dit plus tôt : la famille présidentielle était vraisemblablement paniquée. Aussi, le président a-t-il pris sur lui-même de régler cette affaire qui l'empêchait de dormir. Toute l'équipe de ceux qui étaient de bons et loyaux serviteurs a été mobilisée pour régler cette affaire au plus vite. C'est aussi pourquoi le président ne pouvait supporter de laisser le ministre de la justice opérer tout seul. Les divers témoignages recueillis aux abords du cabinet de Me Lissade confirment qu'un nombre imposant de véhicules généralement faisant partie du cortège de la présidence était constaté en position de stationnement dans les parages du cabinet. Une pauvre femme qui généralement tient son commerce dans les parages dit en avoir dénombré dix-huit. Mais pire, une polémique a suivi une phrase apparemment anodine du président qui disait : « Je ne sais pas si le Premier ministre était présent, comme c'est tout près de ses bureaux au ministère de la planification. Moi, je n'y étais pas. » Pourquoi celui qui a dit qu'il revenait aux autres (ses accusateurs) de prouver qu'il était présent à la réunion a-t-il tenu à faire cette remarque. Serait-ce pour nuire au Premier ministre ou se dedouaner ? Il n'aurait pas besoin de se dedouaner si la responsabilité de la preuve incombe aux accusateurs. Surement, il était inquiet qu'il pouvait être surpris et que de la sorte il voudrait impliquer le premier ministre à sa place. Il n'était pas totalement certain que la mort du juge pourrait enterrer ses agissements pour le moins suspects. Un proche du premier ministre a repondu à la boutade du président en déclarant n'être pas trop certain que le premier ministre aurait l'habitude d'utiliser le cortège du président. Tout cela, ne fait – au-dela des récits du juge- que confirmer la présence du président à cette réunion. Soustraire les responsables de la sécurité du palais national et du président de la République au questionnement de la commission n'a qu'un seul objectif : barricader les acteurs les plus vulnérables pour les empêcher de laisser fuiter des informations précieuses et embarassantes. Mais le crime parfait n'existe vraiment pas.

Quant au premier ministre, il a déclaré tout de go devant la commission qu'il n'avait jamais eu la chance de rencontrer le juge. Cela aurait pu être vrai. Mais toujours dans un autre monde.

Comment explique-t-il le fait que Mr Leon Charles ait été rappelé de Washington pour entreprendre une mission de bons offices visant à persuader Mr Florestal qu'il laisse tomber sa plainte, qu'il la retire et abandonne l'affaire. Devant le refus de Mr Florestal, sa première réaction a été d'appeler le premier ministre pour le mettre en contact avec Mr Florestal. Le premier ministre a offert à Mr Florestal de l'argent et un poste à l'exterieur du pays. Florestal refuse toujours et Léon Charles est parti.

Pourquoi le premier ministre avait-il cru bon de s'impliquer dans cette affaire quand il a lui-même déclaré à la commission qu'il avait suivi l'affaire comme tout citoyen en laissant le soin à la justice de sévir ? Mais pourquoi a-t-il été si évasif quant à son occupation du temps ce jeudi 11 Juillet 2013 ? Si toute l'équipe devait se montrer loyale et solidaire du président pourquoi se serait-il soustrait à ce petit devoir familial ? Pourquoi aussi avait-il si peur de la commission qu'il a du se faire accompagner de six des membres de son cabinet ? Pourquoi n'a-t-il jamais soumis cette copie du procès-verbal du conseil des ministres de la veille qui lui a été réclamé et qui aurait permis à la commission de vérifier les points à l'ordre du jour et leur relation avec cette épineuse affaire de procès contre la famille présidentielle ? Là encore, on comprend que le premier ministre non plus ne dit pas la vérité sur le sujet.

Conclusions

Tout compte fait, il s'est avéré que la commission s'est retrouvé devant une forteresse de mensonges. Mais, il n'y a pas de forteresse imprenable, il n'y a que des stratégies inappropriées.

La commission a fait de son mieux et a réussi à percer les remparts de refus et de mensonges qui étaient érigés devant elle. Elle a pu reconstituer les faits à partir des nombreux témoignages recueillis des personnes qui avaient senti l'obligation de confier à cette commission ce qu'elles savaient et qui d'après elles pourraient aider à faire jaillir la lumière sur les circonstances qui ont entouré la mort du juge Jean Serge Joseph, en charge de l'affaire opposant au correctionnel le citoyen Enold Florestal, d'une part ; et l'épouse et le fils du président de la République, d'autre part, pour les faits qualifiés de corruption et d'usurpation de fonction qui leur sont reprochés. La commission a découvert :

a) Le juge Jean Serge Joseph, agissant en toute indépendance, a émis le 02 Juillet 2013 un jugement avant dire-droit dans cette affaire, lequel jugement met en cause la responsabilité d'un certain nombre de grands commis de l'Etat dont le premier ministre.

b) Cette décision a ébranlé les bases de la forteresse de concussion en mettant à nu les velléités d'un pouvoir autoritaire et corrompu.

c) Tous les joueurs vedettes de l'équipe ont été mobilisés aux fins d'enterrer au plus vite l'affaire car elle avait commencé à gagner en ampleur et l'administration avait commencé à perdre en crédibilité.

d) La première étape de l'offensive de l'administration a consisté à obtenir du plaignant qu'il retire sa plainte et accepte les prébendes qu'on lui proposait.

e) Devant l'échec de pareille offensive, le pouvoir s'est retourné vers le juge lui-même, abandonnant la manière bâton et carotte pour adopter une politique impériale du Sic volo, sic jubeo, sic pro ratione voluntas. Le juge doit donc faire ce que veut le pouvoir exécutif.

f) Des pressions et menaces de toutes sortes ont été exercées sur le juge Joseph pour qu'il revienne sur sa décision.

g) L'expertise du cabinet Lissade a été mise à profit pour préparer la face (ou farce) juridique du projet de baillonnement de la justice et de toutes les institutions républicaines.

h) Le doyen du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince a servi de pivot central au projet de la présidence en participant à toutes les combines et autres actes de délations devant conduire à cette fameuse confrontation du juge avec les plus hautes autorités exécutives du pays.

i) Le jeudi 11 Juillet 2013, une réunion s'et tenue au cabinet de Me Gary Lissade. Le doyen Me Raymond Jean Michel a conduit lui-même le juge Jean Serge Joseph à cette réunion.

j) Au cours de cette réunion, le juge Joseph a été soumis à d'intenses pressions et menaces pour le porter à accepter d'ouvrir un siège spécial afin de revenir sur la décision du 02 Juillet 2013.

k) N'ayant pas examiné la these de l'empoisonnement qui, même si elle était prouvée, serait difficile à circonscrire dans l'espace et le temps, la commission a acquis la conviction que les menaces et pressions ont eu gain de cause de la vie d'un juge honnête mais fragile.

l) L'hémorragie intra-parenchymateuse diagnostiquée serait la conséquence directe d'une forte soumission à d'intenses pressions psychiques.

m) Le juge n'ayant jamais été diagnostiqué comme souffrant de problèmes métaboliques (hypertension artérielle, hyperglycémie, etc), les médecins de l'Hôpital Bernard Mevs ont conclu que la très forte tension artérielle constatée chez le patient à son admission à l'hôpital est peut-être le résultat d'une hypertension intra cranienne qui elle-même peut avoir été le résultat d'un stress immense.

n) La commission conclut au fait que le président de la République, le premier ministre, le ministre de la justice, le doyen du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince ont tous menti tant à la commission qu'à la nation.

o) La commission finalement conclut que tous ceux qui ont contribué à l'organisation de la réunion, participé à la réunion, menti à propos de la réunion au cours de laquelle le juge Jean Serge Joseph a été torturé jusqu'à ce que mort s'ensuive, sont à des degrés divers reponsables de la mort du juge. Il demeure entendu que seul l'appareil judiciaire aura à établir les degrés de responsabilité de chacun dans la mort du juge Jean Serge Joseph.

RECOMMANDATIONS

Fort de ces conclusions, la commission recommande que :

1) Le doyen du tribunal de Première Instance de Port-au-Prince soit traduit par devant le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) comme le premier suspect dans cette affaire avant d'être limogé et livré à la justice haitienne aux fins de droit.

2) Le présent rapport soit transféré à la chambre des députés aux fins utiles.

3) La Chambre des députés prenne toutes les dispositions que de droit aux fins de :

a) Constater l'immixtion du chef de l'Etat, du premier Ministre et du Ministre de la justice dans l'exercice souverain du pouvoir judiciaire aux fins d'obtenir que des décisions de justice soient prises en leur faveur.

b) Déclarer le caractere parjure de ces autorités du pouvoir exécutif qui ont tous nié leur participation à la réunion du 11 juillet 2013 alors que l'enquête confirme leur participation effective à ladite rencontre.

c) Constater la trahison du chef de l'Etat qui avait juré de faire respecter la Constitution et les lois de la République d) Mettre en accusation le chef de l'Etat pour crime de haute trahison.

4) Le premier ministre et le ministre de la justice soient mis en accusation et renvoyés de leur fonction.

5) Le présent rapport soit transféré au Parquet du Tribunal civil de Port-auPrince et au CSPJ aux fins utiles de droit.

6) Le CSPJ soit renforcé par

a) l'amendement de la loi du 4 septembre 2007 portant création du Conseil

Supérieur du Pouvoir Judiciaire ;

b) le vote d'une loi portant création d'une structure contrôlée par le CSPJ, chargée de collecter et de gérer les amendes prononcées par les Cours.

c) La prise en charge de la gestion financière des Cours et Tribunaux par le CSPJ.

7) La préparation et l'adoption d'une loi sur les enquêtes parlementaires.

8) La préparation et le vote d'une loi sur le parjure.

9) L'action publique soit mis en mouvement contre Gary Lissade pour recel.

Fait à Port-au-Prince, le 06 Juillet 2013, An 210e de l'indépendance.

Hon. Francois A. Joseph Président

Hon. Westner Polycarpe Rapporteur

Hon. Joel Joseph John

Hon. Steven I. Benoit

Hon. Pierre Franky Exius Membre

Publié le vendredi 9 août 2013

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