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Parti Haïtien Tèt Kale (PHTK): - Les incohérences du gouvernement Martelly/ Lamothe

parti-haiti-tet-kalePar Patti James  -- Soumis à Tout Haiti le 20 Aout 2012


Le parti rose, nouvellement créé,  dénommé Parti Haïtien Tèt Kale (PHTK) et dirigé par le chef de cabinet du président Martelly, Anne Valéry Milfort, se définit idéologiquement comme << un parti de centre droit  de tendance libérale qui est pour le désengagement de l’État dans l’économie>>.  Comment comprendre alors tous les slogans, tout le bavardage et toutes les actions d’éclats du gouvernement Martelly/Lamothe et de la première dame Sophia Saint Rémy Martelly autour de  questions relatives au social ?

 Quel crédit donné à des programmes comme Ti manman cheri ou aba grangou ?  Comment un gouvernement qui est pour le désengagement de l’État dans l’économie peut-il prôner l’éducation gratuite dans un pays où plus de 80% des écoles appartiennent au secteur privé ? Pourquoi la création d’un ministère chargé de la  lutte contre la pauvreté extrême ? Pourquoi, au lieu de prendre des mesures concrètes en vue de stimuler l’investissement privé dans le secteur du logement et de l’immobilier, le gouvernement Martelly / Lamothe, qui est pour le désengagement de l’État dans l’économie, a-t-il foncé tête baissée dans la logique de construction de logements sociaux en contribuant, aidé en cela par  avec Food for the poor, à donner au Morne à cabrit l’aspect d’un vaste cimetière avec des petites maisons qui ressemblent beaucoup plus à des tombes blanchies qu’à des bâtiments habitables.

Qu’est ce qui  explique donc ces incohérences du gouvernement Martelly/Lamothe ? Ignorance ? Volonté démagogique ou absence de vision ? Les trois, en effet.

Le club des bandi legal, nous l’avons en maintes fois souligné, a non seulement une méconnaissance totale des grands enjeux économiques mondiaux mais aussi a des limites théoriques gravissimes qui le rendent incapable de construire  un cadre référentiel cohérent. S’il est vrai que les bandi legal, de part les valeurs intériorisées et les accointances socio économiques,  se situent idéologiquement et politiquement dans le camp des conservateurs de la droite, il est tout aussi vrai que bon nombre d’entre eux ignorent et ne cherchent même pas à savoir ce qu’est   la droite. Pour eux, des concepts comme  centre droit, compétitivité, planification stratégique, libéralisme, croissance, innovation, politique publique  etc ne sont que des mots qu’ils peuvent utiliser n’importe où et n’importe quand. Ainsi, le gouvernement Martelly/Lamothe qui exprime le vÅ“u de développer le secteur touristique avec le capital privé étranger et haïtien n’a jusqu’à présent envoyé aucun signal montrant qu’il est en train de mettre en place des mécanismes  pour y parvenir. C’est le ministère du tourisme qui continue à tout faire en se comportant à la fois comme instance régulatrice et comme opérateur. A l’occasion du carnaval, s’il faut  prendre cet exemple, c’est le ministère du tourisme qui loue les stands destinés aux touristes et non pas des opérateurs du secteur  privé.  Dans certaine ville de province à potentiel touristique comme jacmel, par exemple, c’est le bureau départemental du ministère du tourisme qui s’occupe de l’accueil des visiteurs et non pas les opérateurs du secteur privé et du secteur associatif. En fait, en matière touristique comme dans beaucoup d’autres secteurs, le gouvernement Martelly/Lamothe, qui est théoriquement pour le désengagement de l’État dans l’économie, se montre plutôt partisan de l’intervention étatique. Par ignorance, bien sûr.
 
Mais l’ignorance seule n’explique pas les incohérences et les bêtises du gouvernement rose. Il y a aussi chez les bandi legal une volonté farouche de mystifier la population et de l’empêcher de voir clair. Et cela, depuis le début de l’aventure. Rappelons quelques promesses de campagnes : éducation gratuite, état de droit, logements pour les sinistrés du tremblement de terre  et, aussi,   rupture avec le système de corruption mis en place durant le dernier quinquennat de René Garcia Préval. Qu’a donc fait le gouvernement  jusqu’à date ? Récupération avec un cynisme digne de Ti René du projet Éducation pour tous, création d’un fond noir destiné au financement de l’école gratuite, arrestation d’un député en fonction et autres violations flagrantes de la constitution, domestication d’anciens serviteurs zélés de René Préval comme les frères Lambert du sud’Est, propagandes tapageuses autour de projets bidons comme 16/6 et le parc industriel de Caracol. Un ensemble d’initiatives qui montrent le caractère démagogique et rétrograde du pouvoir rose qui, incapable de proposer des réponses concrètes aux problèmes du pays, se réduit à faire de l’exhibitionnisme à la Sweet Micky.

Beaucoup de slogans et beaucoup d’actions de communication mais une politique de communication sans cohérence et sans orientation véritable. Alors que le pays fait face à des problèmes cruciaux d’ordre sanitaire et environnemental, les stations de service public, Radio et Télévision Nationale, ont aujourd’hui moins de 1% d’heures d’antennes consacrée à ces questions. La Radio Nationale est une boîte à musique, la tendance dessinée pendant le quinquennat de Ti René se trouve ainsi renforcée. Là encore, Michel Martelly a menti à la population. Pas une seule émission éducative sur le réseau RTNH dirigé par un ancien animateur de Compas Direct. Comment un gouvernement qui  est pour le désengagement de l’État dans l’économie et qui fait de l’éducation sa priorité peut il utiliser l’argent des contribuables pour faire fonctionner une boîte à musique qui n’est même pas en mesure d’informer et de sensibiliser la population sur les  risques auxquels elle est exposée  pendant la saison cyclonique ? Comment un gouvernement qui prétend faire de l’environnement une de ses priorités peut-il trouver normal que ni la Télévision Nationale d’Haïti ni la Radio Nationale d’Haïti n’aient une émission consacrée à la problématique environnementale ? Ces incohérences traduisent non seulement l’inexpérience politique mais aussi l’absence de vision du pouvoir rose qui vient de nommer justement Guyler Cius Delva, un journaliste lavalassien, propagandiste réputé pour ses articles diffamatoires, comme Secrétaire d’État de la communication, après un Mario Dupuy à la culture et un Ronsard Saint Cyr à l’intérieur.
 
 Le gouvernement rose ne sait pas vraiment où il va. Il est entrain de faire flèche de tout bois. Voulant trouver un justificatif aux programmes Ti manman cheri et Aba grangou, le premier Laurent Lamothe a déclaré lors du conseil des ministres des Cayes que ce sont des programmes qui connaissent un très grand succès dans certains pays de l’ Amérique latine comme le Brésil et le Venezuela. Ce que justement le PM rose n’a pas dit ou n’a pas compris c’est que ces programmes ont été lancés par des gouvernements qui ont un très grand souci du social et qui sont pour l’intervention de l’État dans l’économie.  Car, contrairement aux bandi legal, ces hommes et femmes politiques de l’Amérique latine pensent que dans un contexte international marqué par la crise du capitalisme de spéculation et compte tenu des réalités propres à leurs pays, il  est impensable de négliger le rôle de l’État dans la relance de l’économie réelle.
 
Dans une Haïti en proie à ce que la population qualifie de plus en plus de << misère rose>> peut-on, en toute bonne foi, prôner le désengagement de l’État dans l’économie ? Les fondateurs du PHTK (Parti HaïtienTèt Kale) ont-ils pris la peine de bien peser leurs propos ? A la dernière question, les actions du gouvernement Martelly /Lamothe nous autorisent de répondre par la négative...

Par Patti James
Soumis à Tout Haiti le 20 Aout 2012