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Le Syndrome du « Cerveau Lent » (2 de 2)

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LE CERVEAU LENT

Par Alin Louis Hall --- Sacha Guitry nous met sur une bonne piste en disant ceci : « Il y a des gens qui augmentent votre solitude en venant la troubler. - Loin de la partager ainsi qu'ils le prétendent, ils la doublent au contraire - et, même, ils la corrompent en y mêlant la leur. Â» En fait, une simple conversation avec un cerveau lent invite à questionner l’existence de vie intelligente en Haïti. Une expérience aussi pénible qu’arracher une dent sans anesthésie. Dans un débat avec un cerveau lent, même quand on gagne, on perd car il te fait descendre à son niveau pour gagner par expérience.

Il faut comprendre que le cerveau lent se donne la peine de naitre. Comme un arbre, il pousse et respire. Il est du règne végétal. A l’étranger, ce qui est désuet, sale et laid lui rappelle son pays. Chez lui, tout ce qui est beau et splendide ressemble plutôt à « lot bo dlo Â». A la vérité, il part mais ne voyage jamais. Même après le tour du monde. L’histoire du Titanic évoque vaguement en lui le naufrage d’un petit bateau (Ti Tanik). C’est qu’il souffre d’un nanisme mental pathologique. Quand tu lui montres la lune, il regarde ton doigt. Quand tu essaies de l’expliquer que toutes les langues ont été créoles, il se retranche derrière sa singularité linguistique. Gare à toi si tu essaies de démontrer que la Chine, où l’on compte pourtant quelque 200 langues, 24 ethnies chinoises et 55 minorités non chinoises, est devenue tout récemment la plus grande économie mondiale. L’Inde dont l’économie dépassera bientôt celle de la Chine compte pas moins de 22 langues constitutionnelles, lesquelles sont toutes des langues officielles (sauf le sanskrit) dans un ou plusieurs États, des langues régionales officielles non constitutionnelles (comme l'anglais et le français) et des langues sans statut au niveau d'un État mais officielles dans un district ou une municipalité (comme le népali, l'andamais ou le nicobarrais). (4)

Le cerveau lent a une confiance absolue dans les contrebandiers de l’imaginaire. Incapable de faire la différence entre un raisonnement objectif et un jugement de valeur, son esprit est paralysé au niveau de la première étape de l’évolution de la pensée. Si tout phénomène a une origine mystique et doit nécessairement avoir une explication théologique, c’est parce ce que le cerveau lent est sous l’emprise des Témoins de Jéhovah, de Damballah ou d’Allah. Son univers est un sac de nÅ“uds et de nouilles. Son coefficient mental accuse un énorme déficit de discernement et de nuance. Sa malformation congénitale. Il confond la malice à l’intelligence. Il ne comprend pas la rectitude et ne respire que par la concussion et la fourberie. Pour mieux illustrer son blocage mental, il applaudit un Président, qui ne sait comment créer un seul emploi, mais qui dit : « depi’w mete nan tête ou wap travay seke ou te gentan ap travay Â». Déjà, c’était le comble avec le chanteur qui le faisait aboyer comme un chien, miauler comme un chat, etc… Â« Sak pa kontan embake Â». Allègrement, comme un enfant de sept ans, le cerveau lent s’en donne à cÅ“ur joie. Un vrai rachitique mental qui préfère le suicide et la collaboration à la résistance et à la lutte.

Même avec un contexte géopolitique aussi favorable -le blocus naval de l’Angleterre, le support des Etats-Unis qui voulaient le chaos à Saint-Domingue pour forcer la France à liquider la Louisiane, la fièvre jaune qui décima les trois quarts de l’Expédition Leclerc - et surtout la menace imminente du rétablissement de l’esclavage, le cerveau lent ne se serait jamais battu pour l’indépendance. Pourtant, il tient à projeter l’image qu’il est retenu prisonnier de la transe du 18 novembre et de la grande mystique du grand soir du 31 décembre qui déboucha sur le 1er janvier 1804. Pour tromper. Le cerveau lent est un vrai colonisé mental et ne jure que par le colbertisme : « tout, par et pour, la métropole Â». Il préfère « neg bannan la Â» à « neg machine la». Il ne voit pas l’Haïtien en tant que constructeur automobile. Pour le cerveau lent, l’Haïtien ne peut être qu’un coupeur de cannes en République Dominicaine ou à Cuba.

Le cerveau lent est un nostalgique de la traction animale qui n’entend investir un sou dans Coutard Motors. Pour preuve, il interprète deux ellipses superposées comme une tête de bÅ“uf (logo de Toyota). Impossible de voler et de prendre de l’altitude comme le cerf-volant, il lui échappe une notion aussi simple telle que l’intérêt de tout empire est d’affaiblir tous les pays. Bon chien couchant, il ne respire que par les pays dits « amis d’Haïti Â». Bon chien de faïence, il ne veut pas froisser le blanc. Pourtant, en face d’un autre cerveau lent, il est un « Louis Jean Beaugé Â». «Li pa manje anyen ki frèt». Incapable d’anticiper sur l’avenir, il ne peut distinguer le fondamental sur l’accessoire. Dépendant de l’humeur du jour, il fredonne sans relâche : « Mache pran yo, Duvalier mache pra yo », «  Se Aristide ki towo a » ou «  Martelly ou pa vle wè a se li yo va wè. »

Si l’histoire de son pays ne l’intéresse pas, c’est parce que le cerveau lent désire ardemment répéter les mêmes erreurs du passé. Il n’a jamais entendu parler du gigantisme de l’ordonnance du 9 avril 1804 créant le système défensif national d’où les dix-huit ouvrages fortifiés dont les Citadelles Laferrière et des Platons. Il parle abondamment de mettre les « têtes ensemble Â» mais ne sait absolument rien de l’Entrevue du Camp-Gérard, le congrès politique qui scella l’alliance fragile de la marche obligée. Il passe chaque jour par la rue Ogé et déambule la rue Chavannes. Mais, il ignore que ces hommes s’étaient retournés contre et ont combattu leurs pères. Il ne connait pas le nom de Louis Etienne Gabart qui planta très tôt, au matin du 18 novembre 1803, le drapeau indigène sur le plateau de la Butte Charrier. Il est complètement indifférent au nom de Jean-Jacques Acaau. Il n’a jamais entendu parler de l’Amiral Hamerton Killick. Il ne connait ni Boyer Bazelais ni Edmond Paul. Le nom de l’illustre Anténor Firmin ne lui dit absolument rien. Pour le cerveau lent, Jacques Roumain et Jacques Stephen Alexis n’ont jamais vécu. A la vérité, il fait de l’indigence intellectuelle un sacerdoce. Une vocation même.

Une extension du marronnage a survécu et a résulté dans une vaste opération de « faire semblant Â», devenue depuis des lustres la signature génétique du cerveau lent. N’ayant aucune référence au temps, il n’assimile pas une notion aussi fondamentale que le délai. Sans le reformatage de son cerveau, il ne pourra jamais comprendre que la réforme de l’administration publique passe d’abord par le respect des échéanciers et exige surtout l’utilisation d’un outil aussi important que le calendrier. Selon une étude réalisée par le Group Croissance, cent cinquante mille diplômés font leur apparition chaque année sur le marché du travail. De nos différentes facultés sortent chaque année des médecins, des agronomes, des ingénieurs, des avocats, des gestionnaires et des comptables. A aucun moment de notre histoire, la population n’a fait face à autant d’épidémies. La production nationale n’a jamais été aussi anémique. Les constructions, aussi anarchiques même après le tremblement de terre du 12 janvier 2010. La justice n’a jamais été aussi décriée. L’Etat n’a jamais été aussi mal géré. On peut donc comprendre pourquoi le vote est devenu une transaction commerciale. Surtout au deuxième degré. Avec une structure mentale aussi déficiente, le cerveau lent se barricade derrière le particularisme aveugle. De la marmite comme unité de mesure au système de classification hôtelière « hibiscus Â», le cerveau lent ne jure que par le « sui generis Â». Il n’entend pas projeter l’universel sur les 27,750 km2 et ne vit que pour le « pito’n led nou la Â». Il parle de politiques publiques mais ne comprend ni la transversalité, ni la cohérence, ni l’intercommunalité. Encore moins l’ingénierie territoriale.

Le cerveau lent ne tient que des discours creux. Il parle sans conviction de production nationale et ne fait pas le lien avec la nécessité de redéfinir une meilleure politique de transport public. Là encore, il ne perd pas son temps à réfléchir sur l’opportunité que représente Coutard Motors pour proposer des prototypes haïtiens pour le transport public. Il ne comprend que la création de richesse passe par la transformation. L’assemblage associé à la fabrication locale de pièces est trop compliqué. Pourtant, ce champion de l’assemblage de vêtements se voit comme un industriel. La création d’emplois n’est pas vraiment sa principale motivation. Il recherche le profit facile. Les idées mènent le monde. Pas celui du cerveau lent qui confond imitation et innovation. Vive la rente ! Adieu retour aux champs déjà rendu impossible avec la quasi-totalité de la force laborieuse s’adonnant au taxi-moto. Pour le cerveau lent, il n’existe pas de corrélation entre ce mode de transport avec la criminalité, la balance de paiement (facture pétrolière et importation de pièces), les pressions sur les installations sanitaires déficientes et un Produit Intérieur Brut (PIB) déjà anémique. Toujours est-il que le cerveau lent veut récupérer cette industrie de la misère. Tout pour lui, rien pour les autres. Il doit tout rafler. Sa devise : « la flibusterie fait ma force Â». Deux jours à vivre ! N’essaie surtout pas de le convaincre que le néo-libéralisme est responsable de la désarticulation de l’économie haïtienne. Exercice futile.

Le cerveau lent est aussi bien un objet marchant non identifié (OMNI) qui aime noyer le poisson. Il pratique systématiquement l’évasion fiscale. Suite au tremblement de terre de 2010, la dette extérieure a été pratiquement effacée. Mais l’administration Martelly-Lamothe-Paul a remis la corde autour du cou d’Haïti et la dette extérieure en 2016 est de 1.7 milliard US$. Quand tu dénonces la gargote au nom de la bonne gouvernance, le cerveau lent te dit : « ba Haiti on chans Â». Il ne s’intéresse pas à la croissance économique et ne comprend pas que l’ouverture qui se fait à Cuba diminue les chances d’Haïti. Il est au service du conjoncturel. Pour masquer le structurel et contrer toute transition transformatrice. Il ne jure que par le relationnel et le matériel pour combler son vide existentiel. Pour être, il doit paraitre. Sa principale motivation et sa raison d’être. Pour se dérober à la déresponsabilisation collective, il invente des mécanismes compensatoires auxquels il s’accroche pour donner au temps le temps de faire son temps. Le cerveau lent est un chronophage. Son code mental ne lui permet pas de faire la différence entre bienséance et faiblesse. Il ne reconnait que la force. Quant au petit du cerveau lent, dès la naissance, il pratique sa violence en chassant les chiens et les chats du quartier. « Woch ! Â» Avalanches de pierres. Sans raison apparente, la nature est son cobaye. Il s’exerce à arracher les plantes et les fleurs sur la place publique. On lui apprend très tôt à jeter les « sachets noirs Â» sur la voie publique. Difficile donc d’imaginer que respirer ce qui sort de la « déflagration Â» de ces « coktails molotov Â» soit sans effets additionnels sur la structure mentale des cerveaux lents lorsque, eux encore, les piétine.

Enfin, le cerveau lent met toujours la charrue avant les bÅ“ufs. Il applaudit le « Pacte pour une Education de qualité Â» mais ignore complètement les conditions sanitaires minimales pour dispenser cette éducation. Déjà, il y a plus de 2000 ans, l’eau était courante à Rome dans toutes les maisons. Mais, le cerveau lent a pour champions les porte-étendards du « faire semblant Â» qui ont cautionné toutes les forfaitures de la dernière tentative du coup d’état électoral. Ne demandez donc surtout pas au cerveau lent de comprendre que leur ramage ne rapporte pas à leur plumage. A cet effet, il convient de rappeler la longue tradition de raccourcis des intellectuels haïtiens. Thomas Madiou fut le Ministre de l’Instruction de Soulouque. Fréderic Marcelin accepta d’être nommé Député par Septimus Rameau en 1870. Joseph Cadet Jérémie fut trois fois ministre des Relations Extérieures sous les gouvernements de Nord Alexis en 1903, Antoine Simon en 1911 et Davilmar Théodore en 1915. Une rue et une place publique de la capitale portent le nom du principal responsable des dernières mesures liberticides contre Firmin. Comme tout bon chien couchant, le cerveau lent est reconnaissant et docile. Quand à Sténio Vincent, il a cautionné toutes les forfaitures de Tonton Nord contre Firmin. Il fut la première personnalité à recevoir la visite de François Duvalier. Pour la circonstance, la consultation est gratuite. Recommandation: abolition du Sénat à la première occasion. La problématique de la mauvaise gouvernance est liée également au poids des traditions qui, comme le cerveau lent, ont la vie dure. A ne pas tenter de l’expliquer que la bonne gouvernance commence avec l’autolimitation, c’est-à-dire la gouvernance de soi. Pour ton malheur !

UN DEFICIT ENDEMIQUE D’ANTICIPATION SUR L’AVENIR

La notion de communauté épistémique désigne les canaux par lesquels de nouvelles idées circulent des sociétés vers les gouvernements, et d’un pays à l’autre. Elles sont définies par Peter M. Haas comme des « réseaux de professionnels ayant une expertise et une compétence reconnues dans un domaine particulier qui peuvent faire valoir un savoir pertinent sur les politiques publiques du domaine en question. Pour changer de paradigmes. Le secteur vodou majoritaire et organique devrait donc permettre de redéfinir l’idéal haïtien. Cependant, si ce secteur fort d’au moins six mille houngans, n’arrive pas à reformater le cerveau haïtien, on est en plein droit de se demander qui pourra le faire.

Dans l’intervalle, avec seulement dix psychiatres pour onze millions de cerveaux lents(5), une croissance anémique et une démographie galopante, Haïti se retrouve au carrefour de la culmination des tous les dénis de réalité et de la somme de tous les dangers. S’ils veulent vraiment échapper à la condition d’animalité dans laquelle le statu quo les maintient, les cerveaux lents doivent apprendre à réfléchir. En écho au principe sacré du droit inaliénable à l’avenir, ils se doivent de placer de la problématique du développement durable d’Haïti comme l’un des axes prioritaires de leur réflexion au cœur. Où habiter? Où travailler? Comment trouver les moyens pour créer la croissance et le développement? Comment préserver et améliorer la qualité de vie et de l’environnement? Autant de questions auxquelles les cerveaux lents doivent trouver les réponses.

Ailleurs, le capitalisme fait face à ses contradictions internes entre politique monétaire et crise de l’endettement dépassant le PIB jusqu'à menacer la croissance. Sous d’autres cieux, les principales préoccupations restent le taux de croissance, le taux de change et l’inflation. Les pays pratiquant un taux de change flottant maintiennent leur indépendance monétaire et l'intégration financière, mais sacrifient la stabilité. Les gouvernements qui maintiennent un contrôle serré sur les entrées et sorties de capitaux peuvent conserver leur indépendance monétaire avec un taux de change stable, mais renoncent à l’intégration aux marchés financiers internationaux. Les Etats qui maintiennent la stabilité du taux d'échange avec des taux fixes rejettent la possibilité d'avoir une politique monétaire indépendante. Ailleurs, les déficits jumeaux sont la préoccupation majeure. Ici, le cerveau lent ne se reconnait qu’en Bouki et Malice, les deux « marassas Â» de l’imaginaire collectif haïtien. En voulant toujours être Malice, le cerveau lent est le plus souvent le grand Bouki.

Avec un niveau aussi élevé de « calbindage Â», on ne voit pas comment une société de cerveaux lents pourra rebondir. Endormi dans l’espérance de la résurrection, le cerveau lent attend la multiplication des pains avec une patience d’asiatique. Son unique instrument financier, la « borlette Â». Il ne comprend pas que le tenancier a 97 chances tandis qu’il n’en que 3 sur 100. Pas étonnant qu’il ne sait pas comment intégrer la diaspora, se dernière opportunité. Il ne voit pas venir le déclin du volume des transferts financiers. A la vérité, à part les cinq cent millions de narcodollars qui transitent annuellement, l’économie haïtienne repose entièrement sur la diaspora. Selon les dernières estimations, les deux milliards comptabilisés par la BRH ne reflètent que les transferts formels qui n’incluent pas les sommes remises aux voyageurs haïtiens pour des parents ou amis. Si nous nous basons sur les trois mille passagers en moyenne par jour, on ne saurait ignorer l’impact du voyageur haïtien qui dépense en moyenne US $ 1,000.00 par séjour. Soit plus d’un milliard de dollars additionnels par an en plus des deux milliards. Ce chiffre très conservateur de trois mille voyageurs par jour devrait permettre également de mesurer l’impact de la diaspora sur les recettes fiscales à raison de $136 de toutes sortes de taxes sur chaque billet d’avion. (6)

Le cerveau lent pense à lui seul représenter l’ile entière. Il a développé la maladie infantile de l’accoutumance à l’assistanat mais n’a jamais pu comprendre qu’avec les pays amis, Haïti n’avait plus besoin d’ennemis. Il ne sait que plumer la diaspora avec les taxes illégales telles que le US $1.50 par transfert et le US$ 0.05/ minute par appel. Il est incapable de penser l’augmentation de l’activité économique pour élargir l’assiette fiscale. Il ne conçoit l’augmentation de la pression fiscale qu’à travers la surveillance des zones frontalières et un meilleur contrôle des douanes. La diaspora est ainsi donc dans le collimateur du cerveau lent qui lui fait payer des taxes faramineuses au niveau des ports de province pour de la pacotille et surtout pour les voitures.

Or, le cerveau lent ne voit pas venir la diminution graduelle du volume de transferts de la diaspora. La base démographique qui assurait ce niveau élevé de transferts financiers se rapproche à vive allure de l’âge de la retraite. Non seulement leur revenu va diminuer mais aussi la deuxième génération n’a aucun lien organique avec Haïti. A cet effet, il importe de faire un bref survol d’oiseau sur notre incapacité à anticiper sur l’avenir. Louverture ne s’était jamais préparé à l’éventualité d’une expédition punitive de Napoléon. Dessalines n’a jamais anticipé l’embargo de 1806 imposé par Jefferson qui pourtant s’est servi de lui. Pétion ne s’était jamais imaginé que la France l’aurait pris au mot lorsqu’il aborde, sans grande conviction ni moyen, la question de l’indemnisation des anciens colons. On connait la suite. Le cerveau lent non seulement n’a pas une capacité d’explication et d’analyse à posteriori des évènements mais se révèle médiocre dans sa capacité à les anticiper.

CONCLUSION

Haïti est un pays d’exceptions ou d’échantillons. Accidentellement naissent des titans comme Jean-Jacques Acaau, Edmond Paul, Joseph Anténor Firmin, Rosalvo Bobo ou Charlemagne Péralte. Une vraie machine à fabriquer les Yayou, qui poignarde le cadavre du Fondateur au pont rouge ; à cloner les Jules Coicou (en réalité Jules Alexis) qui dénonce ses frères Massillon, Horace et Pierre-Louis Coicou et plus d’une vingtaine d’intellectuels en 1908 parce qu’ils avaient tout fait pour sauver la vie d’Anténor Firmin ; et à reproduire les Jean-Baptiste Conzé, qui trahit Péralte. Entre les quatre points cardinaux du système politique haïtien (dictature, anarchie, populisme et fascisme), les cerveaux lents doivent se préparer à faire face à un taux de croissance négative pour le prochain exercice.

Pourtant, des aspirations de toutes sortes se sont manifestées durant ces trente dernières années. L’officialisation du créole et l’affirmation de notre culture ainsi que celle de notre identité, entre autres, ont inspiré des actions partagées. Les cerveaux lents ont voté ces choix politiques fondamentaux sans jamais travailler à un commencement de mise en Å“uvre. Rendez-vous manqués, au mépris des grandes politiques d’intérêt général : éducation, autosuffisance alimentaire, autonomie énergétique, maitrise de l’eau, préservation et valorisation environnementales, bien-être social, production et redistribution des richesses…Vive le « faire semblant Â». Des ratages programmés ! « Le pays est né la tête en bas » disait Edmond Paul, « né sans tête » selon Dantès Bellegarde. Les cerveaux lents, incapables de se réinventer, son des coupeurs de têtes. Abêtis par l’ensauvagement « makout Â», ils dansent à la chaise musicale avec le choléra, le chikunguya et le zika.

Si d’ici 2025, rien n’est fait pour créer les conditions pour stopper l’hégémonie des cerveaux lents et sortir du « non-développement durable Â», Haïti sera prête pour la phase ultime de sa « Dominicanisation ». D’ailleurs, avec tous ces étudiants haïtiens en terre voisine, « los Blancos de la Tierra Â» ont déjà leur masse critique pour mener à terme leur rêve Â« louverturien Â» de l’unité politique et économique de l’ile présentée sur les fonts baptismaux par la grande vadrouille rose.

Il y a longtemps que nous serions tous morts si le comble de l’absurde pouvait tuer. « Les Haïtiens se doivent de perdre le sourire et de lancer un appel pathétique au monde entier pour sortir du trou qu’ils ne cessent de creuser ».(7) Trente ans après, je peux mieux comprendre le sourire amusé de mon grand-père à l’annonce du départ pour l’exil du grand cerveau lent le 7 février 1986. Je peux finalement décoder sa fameuse phrase ce jour-la à la vue de la soldatesque qui fait son grand retour au Palais national :    « Mon fils, rien de nouveau. La nation reprend son destin Â».

Alors, s’éclore le 1er Janvier 1804 pour se faner. Eurêka ! Comme la rose. Quel destin !

Alin Louis Hall

(4) Jacques Leclerc, «L'aménagement linguistique dans le monde» [En ligne] http://www.axl.cefan.ulaval.ca , consulté le vendredi 18 mars 2016.

(5) Jéthro-Claudel Pierre Jeanty, « L’épineux problème des malades mentaux abandonnés à leur sort Â», publié sur www.alterpresse.org le jeudi 31 décembre 2015, consulté le vendredi 18 mars 2016.

(6)Leslie Péan, « Les transferts financiers de la diaspora et le financement du développement d’Haïti Â», publié sur www.alterpresse.org le lundi 17 août 2009, consulté le vendredi 18 mars 2016.

(7) Leslie Péan, « L’État marron et l’aventure Martelly Â», publié sur www.alterpresse.org le dimanche 20 mars 2016, consulté le dimanche 20 mars 2016.