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A propos du « cri » de Milot:Sérénité et solennité de la fonction présidentielle

marvel-dandinPatrimoine et politique :la Citadelle

Le président de la République, chargé d’assurer le bon fonctionnement des institutions, a le droit d’être en colère. Et d’exprimer son mécontentement. Cependant, tout est dans la manière de faire.

Le fonctionnaire qui, éventuellement, ne remplit pas la mission qui lui a été confiée, ne mérite pas pour autant des invectives. La loi sur la fonction publique indique la procédure à suivre et les sanctions à adopter en la matière.

Mais, il ne s’agit pas que de cela. Le chef de l’Etat n’est pas le supérieur hiérarchique direct des fonctionnaires. Il peut toujours s’adresser à eux. Ces derniers peuvent toujours lui répondre avec courtoisie. Les fonctionnaires n’ont cependant de compte véritable à rendre qu’à leurs supérieurs hiérarchiques qui, eux-mêmes, répondent de leur travail au niveau des autres sphères du pouvoir.

Qu’en est-il du ministre, qui n’est pas forcément un fonctionnaire mais dont le statut est éminemment politique ? Le président de la République, chef de l’Exécutif, n’est pas, pour autant, le chef du gouvernement. Ses principales recommandations au Cabinet ministériel se font lors des Conseils des ministres qu’il préside. C’est au chef du gouvernement qu’il revient d’en assurer le suivi.

La dignité de la fonction de président peut sérieusement être mise à mal quand un chef d’Etat donne libre cours à ses émotions. La fonction recommande sérénité et solennité, dans les actes, dans les gestes comme dans les paroles. Elle serait sérieusement affectée au cas où un quelconque fonctionnaire s’aviserait de rétorquer aux propos du chef de l’Etat, en réaction à l’humiliation publique de la part de ce dernier.

Ce serait alors un spectacle hors du commun. En ce sens, un chef d’Etat qui se laisse aller, en public, à des comportements irréfléchis et/ou puérils, s’expose à des situations imprévisibles, qui risquent d’être très regrettables. On se souvient du dialogue public impromptu à Jacmel entre M. Martelly et le sénateur du Nord-Est, Jean-Baptiste Bien-Aimé…

Il importe à présent de souligner qu’un chef d’Etat doit disposer de dossiers avant de se prononcer officiellement sur quelle que soit la problématique. Encore faudrait-il qu’il les consulte et en soit pleinement imbu. Le président Martelly aurait pu avoir une idée de l’Etat de la Citadelle bien avant de s’y rendre. Les dossiers à ce sujet existent. Des responsables de l’Institut de sauvegarde du patrimoine national (ISPAN) ont récemment tiré la sonnette d’alarme dans la presse sur l’état déplorable des monuments et sites historiques. Ils ont à l’occasion mis l’accent sur leur manque cuisant de moyens.

La question qu’on doit à présent se poser : quelle sera la conséquence immédiate du « cri » de Milot , pour qu’il ne soit considéré comme tristement démagogique ? L’annonce par le ministre de la culture de de l’état d’urgence à décréter pour la Citadelle, ne le serait-elle pas tout aussi bien ?

Si tel n’est pas le cas, l’on devrait rapidement nous informer des dispositions qui seraient éventuellement prises au niveau du Ministère des finances pour que des fonds soient débloqués pour des interventions urgentes à la Citadelle. Vu que cette dernière constitue un des symboles les plus frappants de la fierté nationale, comme l’a d’ailleurs soutenu le chef de l’Etat, l’on ne devrait pas s’attendre à ce que les autorités sollicitent ou attendent, pour intervenir, la manne de l’étranger, et même celle de l’UNESCO.

Encore faudrait-il qu’il existe un plan, et il doit en exister, dans le cadre duquel seraient réalisées ces interventions afin qu’elles produisent les résultats escomptés.

Marvel DANDIN