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Le dollar américain, la crise vénézuélienne, ces feux sous notre lait
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- Publié le mercredi 19 février 2014 17:15
Les USA, le Venezuela et Haïti baignent d'un bout ou de tout leur territoire dans la mer des Antilles. De prime abord, il n'y a rien qui cloche dans la relation triangulaire entre ces trois pays. Ils sont amis, à des degrés divers, depuis des lustres. Haïti aime l'un, est aimée de l'autre.
Haïti, le Venezuela et les Etats-Unis d'Amérique ont en commun des relations économiques très fortes. Du pays de Maduro, nous recevons une transfusion pétrolière. A travers PetroCaribe, les fonds alimentent une kyrielle de projets, dont les derniers inaugurés en date font déjà la fierté de la coopération haïtiano-vénézuélienne et particulièrement des Jacméliens, les bénéficiaires directs.
Des Américains, une transfusion de dollars nous arrive sous toutes les formes. Cela irrigue notre économie et nous permet, grâce aux transferts de la diaspora, de vivre au-dessus de nos moyens depuis des années. Dollars doucereusement acquis ne profitant jamais, la balance commerciale d'Haïti s'enfonce dans un déficit chronique. Nous exportons pour moins d'un milliard de dollars, mais importons pour plus de six, ces derniers temps.
De petits soubresauts risquent de mettre à mal notre relative aisance. La nouvelle crise qui secoue le Venezuela est sans doute politique. Elle a des appuis étrangers, sans doute aussi. Mais ses racines sont sociales. Les habitants du Venezuela, notre principal bailleur de fonds, veulent plus de leur gouvernement. Cela aura des conséquences sur ce que nous recevons de ce pays ami. Tôt ou tard.
Dans un communiqué publié ce mardi, le ministère des Affaires étrangères a exprimé « la plus vive préoccupation du gouvernement haïtien par rapport aux mouvements violents et déstabilisateurs qui se sont produits au Venezuela au cours de la semaine écoulée ».
Un autre signal d'alarme a été tirée ce mardi. Par l'ambassade américaine en Haïti. Dans une note, au demeurant anodine, l'ambassade a annoncé un ajustement des tarifs de ses services consulaires. Rien de plus normal. L'ambassade a tenu à préciser «qu'à partir du lundi 17 février 2014, le taux de change pour les frais de traitement de dossier passera de 44.00 à 46.00 gourdes pour un ($1.00) dollar américain ». Cela change la donne. Ce n'est pas le tariff qui augmente mais le taux de change
Depuis des semaines, le taux officiel affiché par les institutions bancaires de la place ne reflètent plus les réalités du marché des changes. Des particuliers et des institutions achètent le dollar, devise rare, plus cher que ne le suggère le taux officiel. L'ambassade américaine vient de dire tout haut ce qui se sait ici et là : le dollar américain ne vaut pas 44 gourdes 50 ou 44 gourdes 75 ni 45 gourdes, mais 46 gourdes chez elle.
Un emballement du taux de change peut, comme un tarissement de la manne vénézuélienne, avoir un effet social immédiat sur les ménages en Haïti. Le gouvernement Lamothe, euphorique dans les annonces de nouveaux chantiers et projets, surveille-t-il les indicateurs économiques ? Jusqu'à quand pourra-t-il subventionner les produits pétroliers, la consommation d'électricité et la croissance sans contrepartie de l'économie dominicaine ? Laurent Lamothe sait-il que le lait de la paix sociale est sur des charbons ardents ?
Dans une interview accordée à l'Agence France-Presse, évoquant la situation économique d'Haïti, Mgr Chibly Langlois, qui sera créé cardinal ce samedi au Vatican par le pape Francois, parle d'une situation « alarmante ».
« Nous sommes dans une société où il y a plein de difficultés sur le plan financier et économique.»
« Il y a beaucoup de problèmes dans les familles. Les gens n'ont pas les moyens de répondre à leurs besoins, de faire face à leurs responsabilités. Il y a une grande crise économique. La crise politique et institutionnelle que le pays vit actuellement reflète quelque chose de plus cuisant. C'est une question de gestion des biens et des ressources », selon le président de la CEH.
Son Eminence sera-t-il aussi écouté sur les questions économiques et sociales qu'il l'est sur les questions politiques depuis le lancement du dialogue interhaïtien ?
L' alerte du cardinal Langlois, aura-t-elle un meilleur sort que celle de la représentante de la Banque mondiale qui suggérait des dépenses plus sages à la cigale que nous sommes ?
Frantz Duval
Source: Le Nouvelliste
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