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Lamothe monte en puissance
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- Publié le mercredi 8 août 2012 12:28
Le Premier ministre Laurent Salvador Lamothe monte en puissance. Il a la confiance du président. C’est le moins que l’on puisse dire en le regardant, large sourire, chuchoter quelques mots à l’oreille gauche de Michel Martelly, à une réunion d’évaluation de politiques avec la BID, à l’hôtel Karibe, le mardi 7 août 2012. Assis entre Luis Alberto Moreno et Marie Carmelle Jean-Marie, le grand argentier de la République, les deux hommes forts d’Haïti affichent une complicité digne d’époux fidèles. Tout est rose, comme la chemise du président et la cravate de son lieutenant, ex-tennisman, homme d’affaires ayant connu un certain succès dans les télécoms.
Laurent S. Lamothe, regard froid du gladiateur, a délogé Me Thierry Mayard-Paul du ministère de l’Intérieur. Ronsard St-Cyr, cravate rose, est l’heureux bénéficiaire de la chute de l’aîné des frères Mayard-Paul, en froid avec Lamothe. Ce que Lamothe dément. « Ce sont des ragots. Nous cherchons à obtenir des résultats. Thierry est mon bon ami », déclare le Premier ministre au moment de serrer la main à quelques personnes, en marge d’une conférence de presse avec Moreno.
La mise à pied de Thierry Mayard-Paul n’a rien de personnel. Ni celle de Réginald Paul, titulaire de l’Education nationale, ni celle de Jean Ronald Toussaint, titulaire du portefeuille de l’Environnement. « C’est pour mieux dynamiser la performance de l’équipe gouvernementale », explique Laurent S. Lamothe. « Nous remercions et apprécions les ministres sortant qui ont fait de leur mieux pour servir le pays », indique le Premier ministre avec une élégance, loin d’atténuer l’ardeur du constat d’échec des sortants. « Malheureusement, ils n’ont pas eu de succès », poursuit Laurent S. Lamothe, la tête déjà aux Cayes où se tiendra dans vingt-quatre heures le prochain conseil de gouvernement.
Un goût amer
Si les tentatives de joindre Thierry Mayard-Paul et Réginald sont demeurées infructueuses, le ministre de l’Environnement sortant, Jean Ronald Toussaint, répond à son téléphone. « Jusqu’à présent, c’est par un Black Berry Messenger (BBM) que Me Salim Soukar, chef de cabinet du Premier ministre, m’a annoncé la nouvelle », confie Jean Ronald Toussaint, direct, en taxant cela « d’inélégance ». « J’ai essayé de servir mon pays, de servir le président Martelly du mieux que je pouvais », enchaîne Jean Ronald Toussaint, persuadé d’avoir payé le prix des mesures impopulaires pour évacuer des populations vivant dans des aires protégées, à morne L’Hôpital et au Parc La Visite. « Ma position consistait à diminuer le coût social et politique des opérations de ce genre pour le président et pour le gouvernement », explique-t-il.
Remaniement et opinions
« Ce n’est pas une surprise. C’est un dénouement assez rapide d’un conflit qui existait entre deux clans au sein du gouvernement. Apparemment, Laurent Lamothe semble être le vainqueur », constate Mirlande H. Manigat, secrétaire générale du RDNP, candidate malheureuse à la dernière présidentielle.
La femme politique souligne que ce remaniement ne changera en rien les orientations du gouvernement. « Ceux qui entrent au gouvernement ne changent pas la nature et l’image en termes de méthodes, de sérieux et de vision », affirme Mirlande H. Manigat, qui nuance : « Il faut attendre de les voir à l’œuvre ».
Le professeur Sauveur Pierre Etienne, coordonnateur de l’OPL, affiche de l’indifférence et de la répulsion. « Le remaniement ne me fait ni chaud ni froid. C’est l’un des clans du pouvoir qui a le dessus avec le soutien de la communauté internationale », indique le politologue. « La communauté internationale, les ONG et les narcotrafiquants ont la mainmise sur le pays », selon Sauveur Pierre Etienne, acerbe dans ses critiques contre des programmes de l’administration Martelly/Lamothe comme " Ti manman cheri ", " Aba grangou ". « Le peuple est en proie à la misère et cela ne préoccupe en rien le gouvernement », soutient-il avant d’ajouter que René Préval est moins pire que Michel Joseph Martelly. « Nou tap kouri pou lapli nou tonbe nan larivyè », crache-t-il, avec sarcasme.
Laurent Lamothe, 40 ans, inconnu de la scène politique il y a deux ans, vient de lâcher le poste de chancelier et fait tomber dans son escarcelle celui de la Planification et de la coopération externe. Ce cumul n’est pas incompatible, soutient-il, à ses responsabilités d’être le plus possible au pays pour coordonner l’action gouvernementale.
Ce fidèle qui a misé son argent très tôt dans la campagne du candidat Martelly, affiche la patience du marathonien, l’intelligence du rameur qui tourne le dos au rivage. Après avoir ôté l’épine Thierry Mayard-Paul du pied, il monte en puissance. Quelques heures après, en début de soirée, après la forte averse, au palais national, Laurent S. Lamothe imprime attitudes. « Nous ne devons pas compter les jours de travail, nous voulons des résultats », insiste-t-il, sous les yeux du chef de l’Etat, politique en ménageant la susceptibilité des ministres sortants. Dans une équipe, il y a des changements. Cela ne veut pas dire que le joueur n’est pas bon. Chaque match à sa particularité, explique Martelly, soulignant que ces personnalités sont en réserve de la République.
Roberson Alphonse
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Source: Le Nouvelliste