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Haiti-Observateur: Bataille rangée entre Laurent Lamothe et Sophia Martelly qui a fait mainmise sur les principales sources de revenu de l’État

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SUR FOND DE CORRUPTION ET DE MARASME ÉCONOMIQUE

Un autre gouvernement à l'oral en gestation

Haiti-Observateur (Collaboration spéciale) ---Alors que tous les secteurs du pays réclament de vives voix un changement en profondeur de l'équipe gouvernementale, le président Michel Martelly et son premier ministre Laurent Lamothe stagnent dans un immobilisme inquiétant. Plus le temps passe, plus l'impasse persiste, car les tractations en cours depuis des mois semblent fragiliser tout changement susceptible d'améliorer le sort de la majorité nationale. Il apparaît clairement qu'aucun consensus n'a pu être obtenu pour le partage du pouvoir entre les principaux acteurs de l'administration rose qui durcissent leurs positions quand il s'agit de « pousser le dos » d'un ministre incompétent, d'un secrétaire d'État grand mangeur, ou encore d'un directeur général qui ne livre pas la marchandise.

Les prétentions exagérées de Sofia

C'est un secret de polichinelle, à la capitale haïtienne, que la première dame de la république, Sofia Saint-Rémy Martelly, a fait mainmise sur les principales sources de revenu de l'État. À l'orée même de l'accession au pouvoir du chanteur de compas direct, elle s'était évertuée à accaparer tout ce qui lui tombait sous la dent. Ainsi naissait Ti Manman chéri, Ede pèp et d'autres programmes bidon qui, dans la réalité, constituaient des paravents pour gruger les coffres du pays le plus pauvre de l'hémisphère occidental. Décriée dans l'opinion publique et vilipendée par les élus du peuple, ses tentacules persistent encore dans l'administration, notamment par le parachutage de fonctionnaires véreux à tous les niveaux de la fonction publique. On lui accorde la nomination des titulaires de la Santé publique, de l'Éducation nationale, des Affaires sociales, etc. Et, ce ne serait que la pointe de l'iceberg quand on met en compte le contrôle systématique des points de chute de la frontière haïtiano-dominicaine telles Malpasse, Belladère, Ouanaminthe... et les douanes de tous les ports ouverts au commerce extérieur.

Les multiples dénonciations venant principalement de certains sénateurs et députés, d'un consortium de juristes notoires, ont plutôt raffermi sa position par le transfert de ses manœuvres aux Fonds d'assistance économique et social (FAES), véritable vache à lait du régime Martelly/Lamothe. Ce sont ces privilèges qu'elle n'entend point perdre quand vient l'idée d'un remaniement ministériel.

Laurent Lamothe pris en sandwich

Loin de mettre en veilleuse l'action dévastatrice de la première dame de la république, le Premier ministre Laurent Lamothe, qui a du mal à masquer son ignorance de la chose publique, peine à s'interposer contre les agissements de Mme Martelly. Sa piètre performance devant les différents comités du Sénat sont la preuve flagrante du statu quo qu'il entend maintenir au détriment d'une saine gestion des deniers publics. Pris entre les magouilles de la famille présidentielle et de ses satellites, il ne peut « nager pour sortir », tellement apparaît alléchante la place qu'il occupe. Lamothe a, en effet, l'avantage de parcourir les mers du monde afin d'« établir des liens pour le futur », tout en arrosant des proches des fameux contrats sans appels d'offre. Une pratique dénoncée par plusieurs pays donateurs qui prêchent la transparence dans ce secteur pourvoyeur d'emplois et générateur de revenus.

Pour le moment, le Premier ministre Lamothe n'a de ressources au sein du cabinet ministériel que son successeur aux Affaires étrangères, Pierre Richard Casimir, un véritable prestidigitateur qui répète aveuglement les moindres sottises de son patron. Il parle encore de la diplomatie des affaires, malgré l'échec de cette politique mise de l'avant par Laurent Lamothe, lors de son passage à ce ministère. Casimir avait prétendu que le cholera n'avait pas été introduit dans le pays par les forces onusiennes alors que des instances de l'ONU reconnaissaient le contraire. Cette semaine encore, la diplomatie haïtienne était à genoux face aux agissements du gouvernement dominicain qui a exigé et obtenu le report des communiqués sur la menace que représentait la grippe aviaire dans le pays. L'autre ressource de Lamothe reste incontestablement son ministre des Finances, Wilson Laleau, dont la performance est très discutable. Contrairement à son prédécesseur, qui connaissait ses dossiers, le ministre Laleau est comme une décoration à son ministère. Il ne s'est pas révélé de taille face au président de la Com - mission des Finances du Sénat, Jocelerme Privert, et même face au sénateur John Joël Joseph.

D'autre part, ne connaissant pas encore le milieu politique et social haïtien, Lamothe est contraint de « prendre » ce qu'on lui donne. D'après des sources proches de la primature, le Premier ministre ne possède pas toutes les données des différents dossiers qu'on lui soumet. Pire encore, il ne connaît pas encore le nom de ses principaux collaborateurs. Donc, il est obligé de se confier à un cabinet obscur qui « manœuvre » en son nom. Voilà où nous en sommes dans ce pays qualifié souvent d' « État sans nation », avec un gouvernement incompétent, prédateur des deniers publics.

Martelly dirige le pays comme une bande de mardi-gras

Quand au président Michel Joseph Martelly qui, dans les moments difficiles, ne dort jamais, il porte sur ses épaules l'irresponsabilité patente de l'équipe gouvernementale. Il feint de diriger, de nommer des fonctionnaires, voire d'atterrir, comme on le dit. Mais sur le terrain, son gouvernement est à l'oral. Dans un pays où il faut sauver les apparences, Martelly est le seul à se prendre au sérieux. Malgré toutes les dérives du gouvernement Martelly/ Lamothe, il s'accorde un satisfecit, crie victoire, inaugure deux ou trois kilomètres d'asphalte à l'occasion, un parc ici ou un terrain de jeu là, gesticule, inconscient qu'il est de la dégradation de la situation générale du pays. Selon Himmler Rebu, « on ne dirige pas un pays comme une bande de mardi-gras ». C'est ce que fait effectivement le président Martelly.
Un cabinet ministériel dysfonctionnel

Contre vents et marrés, le ministre responsable des relations avec le Parlement, Ralph Théano, est maintenu en poste quoiqu'il ne puis se mettre les pieds à la Chambre des députés et quoique des élus de la majorité présidentielle aient réclamé sa démission. De- puis près de trois mois, il n'y a pas de titulaire aux Communications. Idem au ministère du Commerce occupé précédemment par Wilson Laleau parachuté aux Finances. Le ministre de l'Éducation nationale, Vaneur Pierre, est la risée d'étudiants et universitaires depuis que le président de la république prend le malin plaisir à le qualifier de Ti pike en public. Au Ministère des Haïtiens vivant a l'étranger, le départ précipité de Bernice Fidélia soulève des inquiétudes. Le sénateur Jean-Baptiste Bien-aimé demande aux « autorités judiciaires de mettre l'action publique en mouvement contre elle pour violation de la Constitution, l'utilisation abusive des fonds de l'État et sa participation à des décisions qui ont engagé l'État haïtien ». En fuite aux États-Unis, elle se terre dans son deuxième pays. D'autres ministres soupçonnés d'avoir plusieurs nationalités sont passibles de tomber dans les griffes des parlementaires. Tout comme le président et son Premier ministre qui tombent sous les mêmes accusations.

Face au manque de leadership du gouvernement Martelly/ Lamothe, le bloc de la majorité présidentielle à la Chambre des députés, Parlementaires pour la stabilité et le progrès (PSP) réclame sa part du gâteau. Tout en souhaitant sa participation au choix des prochains membres du gouvernement, le PSP veut la tête des ministres de l'Agriculture, Jacques Thomas, et son collègue de l'Intérieur et des Collectivités territoriales, David Bazile.
Un autre gouvernement à l 'o r a l succédera au gouverne- ment à l ' o r a l actuel

De compromis en compromissions, l'actuel gouvernement à l'oral Martelly/Lamothe devra céder la place à un autre gouvernement à l'oral. Le président Michel Joseph Martelly, qui a décidé de choisir le moment ou celui-là tombera, subit actuellement les pressions des différentes factions du pouvoir rose en sus de députés et sénateurs gourmands, désireux de participer à la mise à sac des dépouilles du pays. Au pis aller, l'appétit glouton de la première dame sera-t-il rassasié par la reconquête des mêmes privilèges ? La seule ombre au tableau reste le Premier ministre Laurent Lamothe, qui prend goût au pouvoir et qui ambitionne le poste de président de la république. Il a montré ce dont il est capable en invitant le président du Sénat, Simon Dieuseul Desras, au village des sinistrés de Canaan, dans les hauteurs de Corail, sur la Nationale numéro 1 (lundi 17 juin). S'il n'a transpiré aucun détail de ce que les deux hommes ont concocté, on devine qu'ils n'y sont pas allés pour respirer l'air de Source Puante. Simon Desras, qui appartient aux ligues majeures, avait magistralement sauvé le Premier ministre Lamothe d'une résolution, pourtant prévue à l'agenda, lors de sa dernière convocation au Sénat. En attendant que le nouveau gouvernement à l'oral se pointe, le tandem Martelly/Lamothe a du mal à gérer les affaires courantes, toutes les ressources palpables étant siphonnées des coffres de l'État et l'aide internationale suspendue.

Source: Haiti-Observateur

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