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L'ED'H endettée, débranchée, cherche du courant en République dominicaine

Avec une dette d'environ 65 millions de dollars américains, l'Electricité d'Etat d'Haïti (ED'H) est plus que jamais en chute libre. L'un de ses trois fournisseurs privés s'est retrouvé, cette semaine, dans l'obligation d'éteindre ses moteurs. Moins 29 mégawatts sur le réseau. Pire. La compagnie va devoir payer, désormais, pour l'énergie des trois centrales du Venezuela.

L'Electricité d'Etat d'Haïti est anémiée. Rationnement total. La ville est dans le noir. Encore une fois, l'ED'H est dans l'impossibilité de payer ses factures. Les abonnés irréguliers sont dans le collimateur de la compagnie. Selon des sources bien informées, aujourd'hui, la dette de l'ED'H s'élève à environ 65 millions de dollars américains pour ses trois fournisseurs privés. Ne pouvant plus tenir après plus de quatre mois d'arriérés, un de ses fournisseurs s'est retrouvé dans l'obligation d'éteindre ses moteurs. L'ED'H, qui lui doit plus de quatre mois d'arriérés, est donc débranchée !

C'est en grande partie ce qui explique le rationnement observé ces derniers jours dans la capitale. Ce fournisseur représente environ 29 mégawatts sur le réseau. L'ED'H doit plus de cinq mois d'arriérés à un autre fournisseur qui n'éteint pas encore ses moteurs. Les responsables de cette entreprise accordent un moratoire de 15 jours à l'ED'H pour éponger, ne serait-ce, qu'une partie de ses factures. Sinon, l'entreprise publique sera à nouveau débranchée.

« E-Power n'est pas sur le réseau de l'ED'H, mais elle ne nous a pas volontairement débranchée », a indiqué au Nouvelliste le directeur général adjoint de l'ED'H. Dukens Raphaël a reconnu que c'est parce que la compagnie qu'il dirige doit de l'argent à E-Power que cette dernière a éteint ses moteurs. « Nous faisons des efforts afin d'amortir nos dettes jusqu'à ce que nous puissions les éponger... C'est comme ça entre des partenaires», a-t-il dit pour montrer qu'il n'y a rien de grave.

La vérité, selon M. Raphaël, c'est que l'ED'H a effectivement des dettes accumulées, mais la compagnie n'a jamais passé six mois sans payer et n'a jamais cessé de payer.

Avec ses 29 mégawatts sur le réseau de l'ED'H, Dukens Raphaël ne nie pas que l'absence de E-Power contribue un peu dans le rationnement observé ces derniers jours dans l'aire métropolitaine. Cependant, a-t-il souligné, il y a aussi des travaux de réparation qui se réalisent sur le réseau.

Une source très impliquée dans la question de l'énergie a indiqué au Nouvelliste que Andress Appolon est en visite en République dominicaine dans le but de négocier avec des compagnies dominicaines dont Indra, qui vont vendre de l'énergie à l'ED'H. «Ce sera la plus grave erreur de l'ED'H si elle achète de l'électricité à un fournisseur dominicain. Il n'aurait aucun problème à débrancher l'ED'H aujourd'hui avec cette question d'interdiction de produits avicoles sur le marché haïtien. Il n'accepterait non plus que l'ED'H lui doit trois, quatre, cinq mois d'arriérés...», s'est insurgé cette source.

Selon cette personne très avisée, c'est une bonne chose pour l'ED'H de réparer les sous-stations, mais ce n'est pas cela qui va résoudre le problème. « Il faut d'abord facturer les abonnés afin de trouver de l'argent pour payer les dettes », a-t-il dit.

L'ED'H va devoir payer les trois centrales électriques du Venezuela

Alors que l'ED'H n'arrive pas à payer régulièrement ses trois fournisseurs privés, la compagnie se retrouve, désormais, dans l'obligation de payer les trois centrales électriques du Venezuela. « L'ED'H n'arrive pas à collecter 50 millions de gourdes le mois, a indiqué au Nouvelliste un ancien haut cadre du ministère de l'Economie et des Finances qui avait travaillé sur ce dossier. C'est à travers la subvention de 2 milliards 500 millions de gourdes par année de l'Etat que l'ED'H arrive à payer ses trois fournisseurs. L'ED'H a accumulé beaucoup d'arriérés », a expliqué notre source, soulignant qu'un seul fournisseur peut avoir jusqu'à 200 millions de gourdes le mois.

Aujourd'hui, a souligné cet ancien haut cadre, l'ED'H va se trouver dans une situation encore plus délicate parce que la compagnie va devoir payer pour l'énergie des trois centrales du Venezuela. « Ces centrales sont alimentées en carburant par le Bureau de monétisation (BMPAD) et c'est encore ce dernier qui paye les firmes qui assurent la gestion de ces trois centrales. C'est en ce sens qu'on avait dit que l'ED'H avait une dette de 180 millions de dollars. »

Selon les clauses d'un accord, ces trois centrales qui se trouvent à Carrefour, aux Gonaïves et dans le Nord devaient commencer à facturer l'ED'H depuis le mois de mai. Ce qui mettra l'entreprise dans une situation encore plus difficile. L'ED'H va devoir payer pour un courant qu'elle utilisait gratuitement alors qu'elle était déjà en situation de faillite. Voilà la réalité de cette entreprise !

L'ED'H devra payer tous les mois maintenant, l'E-Power, la Sogener, l'Haytrac et les trois centrales du Venezuela. L'Electricité d'Haïti paye déjà chaque mois entre 10 et 12 millions de dollars pour l'achat d'électricité à ses trois fournisseurs privés. Avec la facturation des trois centrales, il faut ajouter environ 12 millions de dollars de plus chaque mois, a souligné notre source.

Entre autres, l'ED'H fait face à un double problème. Selon cette personnalité. La compagnie achète de l'énergie qu'elle n'arrive véritablement pas à revendre à cause du phénomène des prises clandestines. En plus, elle a beaucoup de perte sur le réseau. L'ED'H ne reçoit pas l'ensemble de l'énergie qu'elle achète.

Source: Le Nouvelliste
Robenson Geffrard,
Twitter: @robbygeff