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Le "cas Haïti" au Conseil de sécurité, la Minustah confirmée jusqu'à 2016 au moins

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Le Conseil de sécurité des Nations unies s'est penché sur le « cas Haïti » ce mercredi. Des miracles, comme un taux de croissance à deux chiffres, personne n'en attendait. On espérait des progrès à la dimension de l'envie que devrait avoir ce pays pour rebondir, trois ans après le séisme du 12 janvier. En filigrane, il avait plutôt une fatigue. Celle des leaders haïtiens, englués dans des combines et incapables de surmonter leurs différends pour organiser des élections partielles après 16 mois de retard, a confié une journaliste d'un prestigieux quotidien aux Etats-Unis ayant suivi cette réunion.

Cette liberté ou ce droit d'exprimer « la fatigue de la communauté internationale », actrice aussi dans cette mauvaise pièce, Nigel Fisher, représentant des Nations unies en Haïti ne l'a pas. Ce diplomate canadien devient en revanche tibétain, tant il sort ce mantra, cet appel maintes fois renouvelé aux chefs pour qu'ils trouvent les moyens d'organiser des élections crédibles avant fin 2013. « La tenue des élections est une question cruciale en Haïti », a rappelé Fisher. « Les élections de 2013 permettront de renforcer l'État de droit et de répondre à des questions urgentes comme l'emploi et la protection sociale », a-t-il insisté, comme pour recadrer les objectifs. Ceux qu'on devrait suivre.

Dupe ou d'un optimiste béat, Fisher, en échos à des promesses à l'oral des acteurs haïtiens, marque le calendrier. « Hier, a-t-il indiqué, le président d'Haïti s'est engagé à créer, avant Pâques, le Conseil transitoire du Conseil électoral permanent ». Pragmatique aussi, Fisher, d'un autre souffle, met en garde. « Le dénouement de l'impasse politique actuelle est crucial pour la consolidation de la démocratie en Haïti ». Et la mise en place du CTCEP ne sera, a-t-il prévenu, « qu'une première étape avant la tenue d'élections crédibles et ouvertes à tous ». Mais nous n'en sommes pas encore là. Entre-temps, a rappelé Nigel Fisher, qu'il est important « que soient mieux précisés les mandats des donateurs et d'approuver une loi sur les activités des donateurs et sur le financement des partis politiques ». Il est également pour « un accord sur les modalités applicables au Conseil électoral ».

D'autres soucis

Haïti se heurte à d'autres difficultés, a relevé M. Fisher, en présentant le plan de consolidation 2013-2016 de la MINUSTAH, approuvé par le gouvernement d'Haïti, qui fixe les objectifs à atteindre au cours des trois prochaines années. Ce plan reprend quatre tâches principales de la Mission. Le développement accéléré de la Police nationale haïtienne, le renforcement de la commission électorale permanente qui sera créée, le renforcement de l'État de droit et des droits de l'homme, ainsi que l'appui à la réforme de gouvernance aux niveaux national et local et l'aide aux acteurs nationaux pour dégager un consensus sur un processus politique inclusif. « Plusieurs objectifs peuvent être atteints en 2016 », a assuré M. Fisher. Mais, a-t-il poursuivi, ceci exige un transfert progressif des responsabilités en matière de sécurité nationale aux autorités haïtiennes. Sur le front de la bonne gouvernance, Nigel Fisher s'est félicité « des mesures prises pour lutter contre la corruption » avant de s'exprimer sur l'épineuse question qu'est l'épidémie du choléra en Haïti. Il y a un plan visant à éliminer le choléra en Haïti.

Il a rappelé que la famille des Nations unies s'est engagée à le soutenir, notamment en contribuant à l'amélioration de la qualité de l'eau et en renforçant les soins de santé. La politique de tolérance zéro en matière d'exploitation et d'abus sexuels doit aussi être respectée, a-t-il souligné, exigeant que les normes les plus strictes soient appliquées au comportement du personnel.

Oncle SAM mesure l'ampleur de la tâche

L'ambassadeur Susan Rice, représentant des Etats-Unis à l'ONU, a souligné « que les constatations du Représentant spécial par intérim pour Haïti rappelaient l'ampleur de la tâche à accomplir ». La tenue d'élections justes et crédibles est absolument essentielle, a insisté Susan Rice, « préoccupée par le problème de la sécurité ». Celle qui a failli remplacer Hillary R. Clinton au Département d'Etat a « mis l'accent sur la nécessité de renforcer les capacités de la Police nationale haïtienne, en rappelant « qu'un tel renforcement devrait être la priorité de la MINUSTAH ». « Les États-Unis, a-t-elle assuré, appuient tous les efforts en faveur d'un tel partenariat entre la Police nationale haïtienne et la MINUSTAH ». Les États-Unis, selon Susan Rice, restent fortement engagés à soutenir les efforts d'Haïti visant à garantir un avenir meilleur au pays.

WANG MIN, le représentant de la Chine, a souligné « qu'Haïti avait besoin du soutien et de l'assistance continus de la communauté internationale ». Et comme les autres, il a mis l'accent sur la nécessité d'y assurer l'organisation d'élections justes, équitables et crédibles en 2013. Le représentant de la Chine a appelé la communauté internationale à prêter une haute attention aux efforts de relèvement et de reconstruction en Haïti.

Paroles d'Haïti

L'ambassadeur Fritzner Gaspard, représentant d'Haït à cette réunion, a rappelé les grands axes stratégiques et les objectifs de l'action gouvernementale haïtienne. Sur le plan humanitaire, a-t-il dit, il s'agit de faire face aux problèmes d'urgence, dont notamment la situation dans laquelle sont les sans-abris depuis le tremblement de terre. Un nombre de 1 178 000 déplacés ont été relogés, ce qui représente 77% des sans-abris par rapport aux chiffres initiaux, a indiqué Fritzner Gaspard. Dans la lutte contre le choléra, la létalité de l'épidémie a diminué, passant de 5,3% en 2012 à 1,2% à la fin de l'année 2012, a-t-il révélé. Il est important, selon Fritzner Gaspard, de lancer les grands chantiers de la reconstruction fondés sur les six grands domaines prioritaires, qui sont ceux de l'éducation, de l'emploi, de l'état de droit, ainsi que l'environnement, l'énergie et la situation de l'enfance.

En matière d'éducation, un million d'enfants ont été inscrits dans les écoles. Au plan économique, les mesures prises ont permis de stabiliser la situation macroéconomique, d'attirer les investisseurs étrangers et de lutter contre le chômage, a indiqué le représentant d'Haïti. Le Parc industriel de Caracol, situé dans le nord du pays, qui est l'un des plus grands parcs industriels des Caraïbes, a été inauguré, a-t-il signalé. Ce parc, a souligné Fritzner Gaspard, pourra générer dans un premier temps 20 000 emplois directs et jusqu'à 60 000 emplois indirects.

Dans le domaine de l'État de droit, le gouvernement Martelly/Lamothe a mis sur pied le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire et pourvu les postes qui étaient vacants à la Cour de cassation. D'autres mesures comme la formation du personnel judiciaire, l'augmentation des centres pénitentiaires, la lutte contre la détention préventive prolongée, ou l'augmentation du nombre de tribunaux de paix ont été prises. En ce qui concerne la réforme de l'État, le gouvernement a entrepris de réformer l'administration publique à travers le Programme-cadre de réforme de l'État lancé en octobre 2012, et qui s'étendra sur cinq ans. En matière de lutte contre la corruption, près de 200 fonctionnaires impliqués dans des détournements de fonds destinés au Programme de scolarisation universelle ont été arrêtés et traduits devant la justice. Sur le plan politique, M. Gaspard a déclaré que sa délégation prend acte des préoccupations exprimées à propos du retard enregistré dans l'exécution du calendrier électoral lié à l'organisation des élections législatives partielles, municipales et locales. La délégation réaffirme, dans le même temps, la volonté du gouvernement d'oeuvrer à la tenue de ces scrutins, dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions d'honnêteté et de transparence, et dans le strict respect des normes démocratiques, a dit ce diplomate.

Au niveau de de la sécurité, globalement la situation s'est considérablement améliorée grâce aux efforts de la Police nationale haïtienne, appuyée par la MINUSTAH, s'est réjoui le représentant. Haïti a enregistré en 2012, 8 homicides pour 100 000 habitants, un taux qui est nettement inférieur, par rapport à celui prévalant dans d'autres pays de la région, qui est de 25 pour 100 000 habitants, a indiqué M. Gaspar. L'un de ses baromètre pour mesurer et illustrer le climat de sécurité en Haïti a été le « succès éclatant du vingt et unième Sommet des chefs d'État et de gouvernement de la CARICOM, tenu en février dernier à Port-au-Prince ». Selon Gaspard, le plan de développement de la Police nationale pour la période 2012-2016 prévoit une augmentation progressive de 10 000 à 15 000 policiers en 2016.

Sur le plan social, de nombreux défis restent à relever. Le premier concerne la question du financement des programmes et des projets de reconstruction et de développement. Le deuxième défi concerne quant à lui la vulnérabilité d'Haïti aux catastrophes naturelles. Sans une meilleure prise en compte de cette problématique, les tâches de reconstruction ne pourront pas être adéquatement adressées, a averti M. Gaspard qui a lancé un appel aux donateurs. Il faut, a-t-il appelé « maintenir intacte leur générosité et leur compréhension à l'endroit d'Haïti afin de contribuer dans la durée à l'oeuvre de reconstruction de la nation ».

Prêcher à un converti

« On comprend cette position du Conseil de sécurité. Bien avant ce rapport, au niveau de l'exécutif, nous étions déjà bien conscient de l'urgente nécessité d'organiser au plus vite des élections dans le pays afin de combler les postes manquants au Sénat et au niveau des collectivités, les municipalités », a confié le porte-parole de la président Lucien Jura.

Contrairement à ceux qui prétendent que les relations du président Martelly avec le PSP se sont détériorées, il a affirmé que celles-ci « demeurent bonnes ». Le président et PSP font route ensemble parce qu'ils partagent un objectif commun : défendre les intérêts du peuple haïtien, a soutenu Jura. Depuis le lancement du PSP à l'hôtel Indigo, on avait proposé la création d'un bureau pour assurer la coordination.

Il était même question que Me Michel Brunache supporte le ministre Ralph Théano dans cette tâche afin de recueillir les doléances des députés, a assuré Lucien Jura. Cette décision adoptée le 13 mars 2013 en Conseil des ministres pour que les projets et demandes d'emplois présentés par les parlementaires passent par le ministre chargé des relations avec le Parlement « ne sont pas des représailles », a insisté le porte-parole du chef de l'Etat, en voyage au Surinam et à la Guyane. Le président a participé à des réunions de restitution après le forum des chefs d'Etat et de gouvernement de la Caricom organisé en Haïti. Le président, a ajouté Lucien Jura, devra aussi défendre le principe de l'intégration de plus de professionnels haïtiens dans le secrétariat de la Caricom. Le chef de l'Etat devra rentrer au pays ce week-end, a informé Lucien Jura.
Entre-temps, la montre tourne. Et le temps haïtien, reste le temps haïtien. Avec ses joies et ses tracas...

Roberson Alphonse