Economie
Le droit à l’avenir : l’initiative Xaragua 2030 (3 de 5)
- Détails
- Catégorie : Economie
par Alin Louis Hall --- Une décentralisation effective implique une répartition équitable de la gouvernance. Le pilier politique de notre vision préconise la récupération de la gouvernance politique par la création de l'autorité de développement de la péninsule et de ses institutions. Pour la mise en œuvre du grand chantier de la zone économique spéciale, notre vision s’aligne sur la nécessite de réformes dans les secteurs clés qui constituent la pierre angulaire de toute croissance économique. Ce sont les catalyseurs suivants : production d’énergie, équipements urbains infrastructurels portuaires et aéroportuaires, réforme des marchés de capitaux et incubation d’une bourse de valeurs mobilières.
Une croissance à notre portée
La finance « intermédiée » (la banque) joue un rôle majeur dans la croissance économique des pays où la finance directe (les marchés de capitaux) est embryonnaire. En revanche, dans les économies émergentes et matures où existent des marchés de capitaux développés, la finance directe est prépondérante dans le financement de la croissance.
Soulignons les fonctions principales des marchés de capitaux:
(a) La mobilisation du capital pour une meilleure adéquation aux projets d’investissement ; (b) la production et la diffusion d’informations sur les agents économiques pour assurer la pertinence des informations et orienter les décisions des prêteurs d’allouer leurs épargnes aux projets les plus productifs, stimulant ainsi la croissance; (c) la maîtrise et le partage du risque qui facilitent l’échange en offrant des produits variés et en finançant un portefeuille de projets à maturité et à rendement variables; (d) le suivi des investissements de façon à ce que le capital soit alloué de façon optimale aux investissements les plus rentables; (e) le contrôle sur les entreprises et leurs dirigeants en mettant en œuvre des règles de bonne gouvernance. L’efficience du marché et sa capacité à refléter les informations privées et publiques dans le cours des titres relie la rémunération des dirigeants à leur performance, et par conséquent aligne l’intérêt des dirigeants sur ceux des actionnaires; (6) la réduction des coûts des transactions ; et (f) la liquidité des placements financiers en garantissant l’accès au capital à travers les émissions de titres et en permettant aux épargnants d’acheter et de vendre rapidement. (1)
Dans ce même ordre d’idées, lorsque l'introduction en bourse correspond à un placement d'actions nouvelles, elle transforme la relation de l'entreprise avec son banquier qui se traduit concrètement par une baisse du coût du crédit après introduction. Une partie de cette baisse est directement attribuable à l'assainissement de la structure financière due à l'apport d'argent frais et est liée au simple « effet d'introduction en Bourse ». Ainsi, la cotation rassure le banquier qui devient moins exigeant. L'introduction permet surtout d'acquérir une meilleure position de négociation, en faisant jouer la concurrence entre les banques. Sur ce dernier point, pour dissiper toute éventuelle appréhension, il convient de rappeler que, dans les économies ou la finance directe existe, les banques sont encore les acteurs de premier plan. En offrant un éventail de services et produits financiers, elles font beaucoup plus de profits qu’avec les produits bancaires traditionnels.
A travers les innovations financières, les marchés de capitaux ont indéniablement et énormément accru la capacité à drainer l’épargne, à faire circuler des capitaux dans le monde entier, à stimuler l’esprit d’entreprise, à disséminer les risques et à faciliter les contrats financiers. Les différents indicateurs de marchés financiers, positivement corrélés avec l’activité économique, en témoignent. Aussi, pour contrer le refroidissement du marché des entrées en bourse et pour remédier au déficit d’attractivité, certains pays ont adopté une dynamique de démocratisation de l’accès à la formation du capital.(2)
Alternative Investment Market (AIM) est le marché international de la Bourse de Londres pour les petites entreprises en croissance. Depuis son lancement en 1995, plus de 3000 entreprises du monde entier ont choisi de rejoindre AIM pour financer leur besoin d'expansion.
Toronto Stock Exchange Venture Market représente un marché du capital de risque public pour les entreprises émergentes. Autrefois connu sous le Canadian Venture Exchange (CDNX).En 2001, le Groupe TSX (Toronto Stock Exchange), maintenant connu sous le nom de Groupe TMX, en fit l’acquisition et le rebaptisa TSX V.
Pour encourager l'investissement et promouvoir l'entreprenariat, l'emploi et le développement économique, une collaboration entre le gouvernement, l’autorité des marchés financiers et la bourse de la Jamaïque (JSE) a abouti le 1er Avril 2009 au lancement d’un marché junior, rattaché au marché principal.
En 2012, le congrès américain adopta le « Jumpstart Our Business Startups » (JOBS Act) pour le ralentissement du marché OPA. Le 23 Octobre 2013, la Securities Exchange Commission (SEC) promulgua la régulation sur le financement participatif (crowdfunding), énonçant ainsi les règles régissant l'offre et la vente de titres conformément au titre III de la Loi JOBS ACT.
Qu’il s’agisse du Royaume-Uni, du Canada, de la Jamaïque ou des Etats-Unis, les objectifs poursuivis par ces mesures ou réformes témoignent d’une volonté politique au plus haut niveau décisionnel de créer les conditions pour la croissance. Ces dispositions novatrices pour la réduction des coûts d’introduction en bourse ne visent qu’à éliminer les barrières à l’entrée. Aux Etats-Unis, par exemple, ces dispositions reconnaissent le principe que les contraintes réglementaires doivent être proportionnelles à la taille de l'entreprise, et augmenter à mesure à chaque fois qu’elles dépassent la barre d’un certain niveau de revenus annuels. Ce nouveau régime de conformité à l'échelle vise à réduire le temps et les charges financières pour les entreprises intéressées à être cotées en bourse, et à réduire les risques associés avec le lancement du processus d’introduction en bourse. Sans pour autant compromettre la protection des investisseurs.
Toutefois, le développement financier émerge comme élément déterminant et fondamental de la croissance économique. De ce fait, les analyses ont démontré que les marchés de capitaux stimulent davantage la croissance dans les économies émergentes et matures. La libéralisation financière a entrainé une plus grande liquidité de ces marchés avec une nette augmentation de l’épargne et de l’investissement, et par conséquent une hausse du taux de croissance économique. Les résultats obtenus en Inde, en Thaïlande, en Corée et Malaisie ont prouvé que la finance directe a un effet multiplicateur sur la croissance. Ces pays, dans leur histoire récente ont entrepris une réforme en profondeur de leur système financier. Certains résultats semblent suggérer que les grandes places financières mondiales ont été obligées de s’ajuster face à la montée en puissance d’autres bourses. La réduction des couts d’introductions semble avoir provoqué une ruée vers les bourses asiatiques, notamment. Définitivement, un autre résultat intéressant qui mérite d’être souligné.
Rappelons que les marchés de capitaux, en général, réduisent le coût de la mobilisation de l’épargne et de ce fait facilitent l’investissement dans les secteurs les plus productifs. De plus, l'introduction en bourse représente une option crédible pour les entreprises pour lever des capitaux. Elle peut relancer l'intérêt et la viabilité de modèles d'affaires qui, sans cette possibilité, seraient jugés trop exigeants en infusion de capital. Ainsi, pour favoriser le développement des PMEs – in extenso la croissance, les décideurs politiques et les régulateurs doivent créer un environnement où les start-ups les plus prometteurs d'aujourd'hui peuvent se transformer en leaders de demain. Pour y arriver, il faut démocratiser l’accès à la formation du capital et faire tomber certaines barrières à l’entrée.
Aussi longtemps que la démocratisation à l’accès du capital sera retardée, aussi longtemps la croissance sera entravée. Pour qu’Haïti puisse devenir un marché pionnier (pré-émergent), notre système financier doit offrir un cadre optimal d’intermédiation financière entre les agents économiques. Pour y arriver, il faut reconnaitre la nécessité de doter le pays de nouveaux instruments financiers indispensables à la croissance en favorisant l’incubation de la « finance directe » pour accompagner la « finance intermédiée ». Ainsi, leur cohabitation favorisera l’émergence de nouveaux intermédiaires financiers pour une meilleure diversification du risque et la spécialisation des investissements, facilitant ainsi l’accroissement de la productivité du capital et, par conséquent, la croissance économique. Les entreprises et les ménages pourront se procurer les crédits nécessaires pour se libérer des contraintes financières. Dans cet ordre d’idées, une bourse de valeurs mobilières peut apporter un nouveau souffle à l’entreprenariat haïtien et lancer un signal clair aux investisseurs étrangers dans la mesure où ils auront un meilleur contrôle sur leur stratégie de sortie. Elle peut tout aussi bien servir de levier de financement en permettant de mobiliser les ressources financières de la diaspora. En réseau avec les bourses de la région, elle donnera accès à des méthodes de financement et des niveaux de capitalisation sans précédent. Enfin, elle enverra un message positif qu’Haïti est en train de se donner ses propres moyens d’ingénierie financière indispensable à son émergence.
Le financement public des régions et administrations sous-nationales
La viabilité des finances publiques et des emprunts par les administrations décentralisées, tels que les régions, est devenu un problème de plus en important pour les pays en voie de développement. Dans de nombreux cas, l’indispensable déconcentration des services d'infrastructure a engendré des besoins en investissement en services publics au niveau régional. Les gouvernements centraux se retrouvent dans l’obligation de déléguer des responsabilités essentielles à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté. Ainsi l’autorité fiscale, dans de nombreux cas, est sous-traitée au niveau régional, les gouvernements préférant ne pas garantir des emprunts sous-nationaux. D’où une pression grandissante sur les entreprises de services publics d'infrastructure au niveau régional pour être de plus en plus efficaces et commercialement viables, et devenir moins dépendant du soutien financier, y compris des garanties de l’administration centrale.
Cependant, elles ne sont pas nombreuses les administrations régionales ou entreprises de services publics dans les économies émergentes capables de financer entièrement leurs besoins d'investissement quand bien même elles fournissent des services stratégiques. En conséquence, bon nombre de ces entités se retrouvent confrontées à des défis énormes tels qu’un cadre réglementaire déficient, un déficit institutionnel et surtout, l’inexistence de produits financiers adaptés quand ce n’est pas carrément l’accès au financement. Toutefois, il importe de signaler que le programme de financement de la Société Financière Internationale (SFI) de la Banque Mondiale offre à la gouvernance régionale solvable la possibilité de financer des projets d'infrastructure publique sans garanties souveraines. Une opportunité claire pour permettre à Haïti, à travers l’autorité de développement de la péninsule, de contourner le problème de la solvabilité après la banqueroute rose et de bifurquer la notation négative de l’effacement de sa dette externe. A moins d’une structure mentale déficiente, il s’agit de reconnaitre que, pendant le quinquennat des « cerveaux lents », les finances publiques n’ont jamais été aussi mal gérées. Peu s’en fallut qu’on revienne aux planches-à -billets privées comme sous l’administration de Pétion.
Lancé en 2004, ce programme comble un déficit de financement pour les entités régionales dans les pays où les options de financement commercial ne sont pas disponibles ou suffisantes. Il complète ainsi la garantie souveraine de la Banque mondiale, apporte l'appui financier au secteur public et le soutien de la SFI aux projets d'infrastructure par le biais du parrainage du secteur privé et du partenariat public privé. Ce programme fournit un financement à long terme aux entités régionales qui peuvent désormais accéder à la gamme complète des instruments financiers traditionnellement offerts exclusivement au secteur privé. Dans certains cas où les projets sont bien conçus et montés, le financement est disponible dans un délai ne dépassant pas six mois.
Le processus de décentralisation reviendrait donc en premier lieu de définir les compétences de l’autorité de développement de la péninsule. Tenant compte de l’inventaire des ressources disponibles et nécessaires, le flux financier impliquerait l’identification des responsabilités liées aux dépenses, les revenus propres, les recettes et la faculté à s’endetter. Dans les pays à revenu intermédiaire faible, les besoins de prestation de biens publics locaux excèdent normalement la création de recettes courantes. Le transfert de responsabilités des administrations centrales vers les administrations régionales ne saurait se limiter à des instruments à caractère budgétaire, politique et administratif, ce qui en définitive a déterminé la nature du processus de décentralisation. La décentralisation doit entraîner des responsabilités accrues en matière de dépenses, d’administration fiscale et d’endettement
L’autorité de développement de la péninsule doit avoir la capacité à créer ou à réunir les ressources suffisantes pour faire face aux besoins de financement et honorer le service de sa dette, sans avoir à encourir des arriérés, à la renégocier ou à demander à l’administration centrale d’effectuer un ajustement budgétaire significatif. En général, les finances des autorités de développement ont un effet macroéconomique important à l’échelle nationale, augmentant fortement la demande nationale sous le coup de l’accroissement des dépenses régionales. Une attention particulière doit être accordée aux déficits jumeaux pour éviter par exemple la répercussion sur la balance des paiements, par le biais d’un plus grand volume d’importations de biens d’équipement, pour ne citer qu’un exemple. Même si le niveau général de dépenses des autorités de développement est limité par des plafonds fixés sur leur capacité de perception d’impôts et d’endettement, la modification de la composition des dépenses – par exemple une plus grande utilisation de postes qui ont des effets multiplicateurs relativement forts, tels que les travaux publics peut donner une forte impulsion à la demande nationale.
(Ã suivre)
(1) Alin Louis Hall, « Urgences Haïtiennes, des idées pour la croissance… », publié le 19 aout 2014 sur www.lenouvelliste.com
(2) Alin Louis Hall, « Urgences Haïtiennes, des idées pour la croissance… », publié le 19 aout 2014 sur www.lenouvelliste.com
-
Le droit à l’avenir : l’initiative Xaragua 2030 (1 de 5)
-
Le droit à l’avenir : l’initiative Xaragua 2030 (2 de 5)
Les Dernieres Nouvelles
- Le CEP de Berlanger et Carlos Hercule, discrédité, laisse la loi de côté et se lance dans les négociations politiques
- Deux (2) repris de Justice du PHTK aux elections senatoriales Wilfrid Gelin et Fednel MonFleury épinglés, le CEP decrié traine les pieds
- Laissons parler quelques chiffres de Tèt Kale au Prix Vert: Est-ce que ça dérange?
- Le droit à l’avenir : l’initiative Xaragua 2030 (2 de 5)
- Haïti : Entre se « Défendre » et « Mourir » !