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Economie

L'accession d'Haïti à l'OMC en 1996 et la destruction de la structure économique 20 ans après (1re partie)

omc - organisation mondiale du commerce

L'objectif de cet article est d'encourager le citoyen haïtien à se poser des questions sur les raisons qui nous ont poussés à faire des choix qui semblent contraires aux intérêts de la nation. En partant du principe qu'il est de notre devoir de protéger les intérêts de la nation, vu qu'on ne saurait porter, sans preuve, des accusations d'incompétence à l'encontre des responsables, il faut lier ces choix à un manque d'information et/ou à l'amplitude des pressions de certains secteurs internes et d'une frange de la communauté internationale.

Il y a environ 20 ans, la République d'Haïti a adhéré à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), institution régissant les échanges commerciaux entre les pays de la planète. En faisant ce choix, Haïti a contracté deux types d'engagement:

- la mise en oeuvre du Programme d'ajustement structurel exigé par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale;

- la consolidation des droits de douane.

Le premier engagement exigeant la mise en oeuvre du Programme d'ajustement structurel portait sur les droits de douane appliqués. En effet, en l'article 1er de la loi modifiant certains articles du code douanier et rapportant le taux d'ajustement de la valeur en douane publiée dans le journal officiel « Le Moniteur » le 15 février 1995, il est stipulé que l'Administration générale des douanes, pendant une période transitoire (sans mentionner le nombre d'années), appliquera, sauf pour les produits mentionnés à l'article 2 de la présente loi, un taux équivalent à :

- zéro pour cent (0%) pour tous les produits taxés actuellement de 0 à 10% ;
- cinq pour cent (5%) pour les produits taxés actuellement à 15% et 20% ;
- dix pour cent (10%) pour les produits taxés actuellement à 25% et 30% ;
- quinze pour cent (15%) pour les produits taxés actuellement de 35% à 50%.

Il est important de souligner que plus de soixante pour cent (60%) des produits tombaient dans la fourchette des taux variant de 0 à 10%. Autrement dit, l'État
haïtien a volontairement renoncé aux revenus que lui rapportaient 60% de son importation juste en appliquant un tarif 0.

Cette même loi, en son article 2, exemptait de tous droits de douane les produits suivants : la farine de céréales et ses dérivés, les huiles végétales fixes, fluides ou concrètes, brutes épurées ou raffinées, le clinker ou ciment non pulvérisé, le jus de fruit pour enfants, tandis que le riz, le sucre de betterave et de canne à l'état solide, le ciment Portland blanc, le ciment hydraulique ont été fixés à 3%.

Le pays se retrouvait ainsi sous un régime commercial considéré comme étant le plus ouvert de l'hémisphère occidental avec une structure tarifaire appliquée simplifiée et réduite à six taux : 0,3, 5, 10, 15% et un pic de 57,8% sur les produits pétroliers, pendant que les taux appliqués sur plus de 70% des produits importés se situaient entre 0 et 5%.

Avec cette disposition légale, Haïti dispose, au niveau de la sous-région

Amérique latine et caraïbe, de la moyenne des droits la plus faible, soit 17,6% tandis qu'Antigua et Barbuda sont de 58%; 78,1% pour la Barbade; 58,2% pour le Belize; 58,6% pour la Dominique; 34,9% pour la République dominicaine, et enfin 49,8% pour la Jamaïque, tous membres de l'Organisation mondiale du commerce.

Le second engagement portait sur la consolidation des droits de douane, qui obligeait le pays à fixer des taux maximaux ou taux plafonds. La consolidation tarifaire ou tarif de protection est l'accord d'un pays avec l'OMC selon lequel ce pays s'engage à ne pas relever un taux de droit au-dessus d'un niveau convenu. Dès lors qu'un taux de droit est consolidé, il ne peut pas être relevé sans qu'une compensation soit accordée aux parties affectées.

Pour accéder à l'OMC, la République d'Haïti avait décidé de consolider les lignes tarifaires à des taux relativement bas allant de 0 à 10%. 5% d'entre elles ont été exemptés de droits (0%) et 46% ont été consolidés à des taux variant de 0 à 10%.

Pour se conformer aux exigences des négociations, les autorités haïtiennes ont dû intensifier le démantèlement des barrières tarifaires à l'importation ; éliminer toutes les restrictions quantitatives et qualitatives à l'importation ou à l'exportation initiées dans les années 80. Ce qui entraînera la destruction quasi totale de la production nationale et le renforcement de la dépendance économique du pays dans un contexte postembargo.

Au lendemain de 1995, en consolidant ses droits de douane à des taux aussi faibles (moyenne de 18.7 %), sous les regards passifs du secteur privé et de la société civile en général, le pays a donc unilatéralement renoncé à la possibilité de garantir à l'avenir l'investissement dans des branches de production tournées vers le marché local, dans un contexte d'une politique économique qui viserait la promotion de cette production. Un facteur important expliquant l'état actuel de notre économie.

Les engagements contractés par le pays n'ont pas constitué de garanties pour l'investissement et la protection de la production nationale. Cette politique commerciale ou plus spécifiquement le régime tarifaire national (avec des taux de droits appliqués et des taux de droits consolidés aussi faibles) ne correspond pas à la volonté exprimée par les autorités de faire de la production nationale et la réduction de la dépendance budgétaire leur priorité. Les principales entreprises haïtiennes de production, n'ayant pas la capacité de supporter les nouvelles concurrences ajoutées à la contrebande, ont dû fermer les portes tout simplement ou se réorienter vers la commercialisation des produits importés...

A suivre

 Peterson Benjamin Noël,
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Source: LeNouvelliste

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