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René Préval a de nouveau la cote

rene-preval-caracol-en-vedetteEx president Rene Preval en vedette au Parc industriel de Caracol

Tombé en désamour avec le peuple en fin de second quinquennat, René Préval, après s'être muré dans son silence depuis 16 mois, a de nouveau la cote.

Incrédules, certains n'ont pas cru. « Ce n'est pas vrai, Préval est ici ? », s'est exclamé un sexagénaire quand Georges Sassine, directeur de la SONAPI, a reconfirmé que l'ex-président René Préval participe à la cérémonie d'inauguration du parc industriel de Caracol (PIC), lundi 23 octobre 2012. Quand il est salué, puis hissé quelques minutes après sur le podium par le président Martelly pour des hommages mérités à cause de son implication dans le projet PIC, le timide et discret René Préval est remis sous les feux des projecteurs après 16 mois. Pendant ces quelques secondes, le Marmeladais n'a pas pipé. Fidèle à sa légende ou à une règle qu'il s'était fixée après son premier quinquennat.

Les sollicitations n'ont pourtant pas manqué. « Berminda Henry de radio Ibo... Une interview monsieur le président ? « Interview ? Non ! », répond Préval, qui a avancé d'un pas décidé vers la jeune journaliste. Deux bises sur la joue. C'est tout ce que Berminda rapportera à sa DI, Marie Raphaëlle Pierre.

La journaliste n'aura pas été la seule cependant à s'entretenir avec Préval. D'autres, des connaissances, ont eu droit à des étreintes de retrouvailles. Plus que les civilités, l'ex-président a été une vedette, si ce n'est pas la vedette. Son passage à fait couler des salives. Dans ce hangar, les nantis comme les humbles semblaient avoir tourné la page de la fin de règne chaotique de Préval, accusé de tirer les ficelles, de contrôler un CEP, avec des conseillers aussi ripoux que le fameux Gaillot Dorsinvil, en faveur de son dauphin. Une page non effacée est tournée. Et Préval, impopulaire mais jamais détesté vers la fin de son second quinquennat, a pris son petit bain de foule. « C'est une réaction classique dans l'histoire du monde », a commenté Mme Mirlande Manigat. « Un révolutionnaire français avait dit, a-t-elle ajouté, que la république était belle sous l'empire ». La constitutionnaliste a trouvé « normal » l'hommage rendu à l'ex-président René Préval. « Au moins, pour une fois, Martelly n'aura pas pris tout pour lui-même », a ajouté Mirlande Manigat.

Dans la même veine, Himmler Rébu a indiqué que l'hommage rendu à Préval est une « forme d'élégance politique » de Martelly à qui on a reproché d'avoir pris la paternité de ¾ des projets initiés sous l'administration Préval. Quant à l'affection témoignée à Préval, le colonel a estimé que c'est normal. Les 16 mois de Martelly ont suffisamment marqué la différence entre les deux hommes. « Préval était plus sage, plus circonspect, plus présidentiel que Martelly qui est toujours sous les projecteurs », a analysé Rebu.

« En réalité, le peuple haïtien ne déteste pas ses leaders. Il réprouve, parfois avec violence, leurs actions », a estimé un homme d'affaires, encore ému de l'image d'unité projetée par Martelly et Préval, lors de l'inauguration du parc industriel de Caracol.

« Des incidents, il en a connus en tant que chef de l'Etat, mais le train de la démocratisation ne sortit jamais de ses rails sous son leadership. A-t-il des conseils à donner? Sans doute », avait écrit il y a plus d'un mois Frantz Duval, rédacteur en chef du journal Le Nouvelliste.

« Dans les grilles de lecture haïtiennes, l'homme de Marmelade n'est pas le chef idéal. On ne le perçoit pas comme un homme fort, un tout-puissant, un charismatique, un adulé, ni comme un riche. Il n'est pas craint, ne fait pas peur. Si le désamour a marqué ses derniers mois au pouvoir, il n'a jamais pour autant été détesté. Préval est un modèle de modération en tout. Dans ses manières comme dans les sentiments qu'il inspire. Sans renoncer à une once de son pouvoir ni aux privilèges qui y sont attachés, il a su ménager la chèvre et le chou. Il n'a jamais choqué la population autrement que par son indifférence à des moments clés. Homme de sang-froid pas sans foi ni loi, ce Préval », selon l'éditorial titré « Saint Ti René ».

« Le président tétanisé après le tremblement de terre du 12 janvier 2010 et le Préval des élections perdues par la plateforme INITE ne résument pas le fin politique des vingt dernières années. Ses faiblesses et ses échecs ne font que souligner qu'il est un homme », avait fait remarquer Duval, qui a souhaité que le président Martelly s'inspire réellement de ses devanciers.

C'est tout ce mal qui est souhaité par d'autres personnes à Martelly. « J'espère, comme il l'a dit dans son discours, qu'il parviendra à inspirer confiance aux partis politiques, à la société civile », a indiqué un homme d'affaires, l'un des tout premiers supporteurs de « Tèt kale ». Entre les lignes du discours de Hillary Clinton, les Etats-Unis ont appelé à la tenue de bonnes élections. C'est un message politique que le président devra capter, a-t-il ajouté.

« Le rêve haïtien » que Hillary Clinton souhaite voir naître comporte plus qu'un message d'unité. Elle a convié tous les leaders haïtiens à mettre la main à la pâte, a analysé cet homme d'affaires. « Il ne faut pas s'y méprendre. Les Américains errent comme tous les autres, font des choix en fonction de leurs intérêts. Mais, souvent, ils donnent un road map. Sans cette carte, bien des leaders haïtiens se sont perdus en croyant disposer d'un appui inconditionnel de Washington », a avancé cet entrepreneur, avant d'ajouter que même le madré Préval en sait long des retournements de veste d'alliés de la communauté internationale. Après avoir fait deux mandats, René Préval ne peut plus être président, conformément à la Constitution haïtienne.

Roberson Alphonse
Source: Le Nouvelliste